La régularisation par plusieurs permis modificatifs simultanés
Le Conseil d’Etat a récemment jugé qu’aucune disposition légale ou règlementaire ne permet d’appliquer de manière successive l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme pour la régularisation d’un même vice affectant le permis de construire initial (CE, Sect., 14 octobre 2024, n°471936, Lebon).
Mais cet article L.600-5-1 du code de l’urbanisme permet-il de régulariser un vice par plusieurs permis modificatifs délivrés simultanément ?
L’arrêt ici commenté répond positivement à cette question. Il précise ainsi que « les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme […] ne font pas obstacle à la notification au juge de plusieurs permis de régularisation simultanés, quand bien même l'un de ces permis ne se borne pas à remédier au vice à régulariser ».
Dans le cas d’espèce, la Cour avait relevé que le permis de construire initial attaqué, relatif à un ensemble immobilier de vingt-deux logements collectifs, était entaché d’un vice relatif au traitement extérieur d’une des façades. Ayant considéré que ce vice pouvait être régularisé, elle avait en conséquence sursis à statuer sur le fondement de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme (CAA Versailles, 25 avril 2024, n°23VE00814).
Le pétitionnaire du permis contesté avait alors déposé deux demandes de permis modificatifs. La première ne portait que sur le traitement de la façade en cause. La seconde comportait des modifications beaucoup plus importantes, modifiant l'implantation du bâtiment, sa volumétrie et ses façades, avec réduction du nombre de logements.
Les deux permis modificatifs avaient ensuite été délivrés le même jour.
Pour rechercher si le vice avait été régularisé, la Cour examine successivement les deux permis modificatifs.
Elle constate que le premier permis modificatif, relatif à la seule façade en cause, régularise le vice affectant le permis initial et n’est entaché d’aucun vice propre.
En revanche, s’agissant du second permis, elle a estimé qu’il apportait un bouleversement tel au projet initial qu’il n’aurait pu être autorisé que par un nouveau permis de construire. Elle en conclut qu’il ne pouvait, pour sa part, régulariser le vice affectant le permis initial.
En conséquence, la Cour constate, d’une part, la régularisation du permis initial par le premier permis modificatif et rejette le recours en annulation contre ce permis initial. D’autre part, elle annule le second permis modificatif.
Cette solution permettrait donc aux pétitionnaires d’autorisation d’urbanisme de présenter simultanément au juge administratif, dans le cadre de l’article L.600-5-1 du code de l’urbanisme, plusieurs solutions pour régulariser un permis de construire. Elle pose néanmoins la question de savoir laquelle de ces solutions le pétitionnaire devra mettre en œuvre lorsque les permis modificatifs sont réguliers. L’arrêt de la Cour ne répond pas à cette interrogation, ayant annulé l’une des deux mesures de régularisation pour un motif qui pourrait prêter à discussion : il n’est pas évident que le second permis modificatif ait changer la nature même du projet initial, bien que les modifications semblent avoir été importantes.