Actions de préférence et accord individuel des titulaires  

Par un arrêt du 10 juillet 2024, la chambre commerciale précise les conditions de modifications des droits attachés à des actions de préférence au sein d’une SAS. 

Rappel des faits  

En 2007, une SAS a décidé de la création d’actions de préférence « P » donnant droit à un dividende prioritaire. Ce droit correspondait à 8 % du prix de souscription de ces actions ou à 50 % du bénéfice net consolidé par action. 

Le 30 juin 2015, deux sociétés ont acquis des actions de préférence « P ». 

Ultérieurement, l’assemblée générale extraordinaire de la SAS a modifié le montant du dividende prioritaire attaché aux actions de préférence « P ». Ce droit a été réduit à 3 % du prix de souscription ou 15 % du bénéfice net consolidé par action. 

Les titulaires d’actions de préférence « P » ont assigné la SAS en nullité des résolutions de cette assemblée générale et en paiement de sommes à titre de complément de dividendes. 

La cour d’appel de Lyon a rejeté leurs demandes.  

Selon elle, aucune disposition légale n'exige le recueil individuel du consentement des associés à la modification de leurs droits particuliers attachés à certaines actions. De plus, les dispositions de l'article L. 228-15, alinéa 2, du Code de commerce n’étaient pas applicables en l'espèce.  

Les résolutions litigieuses ne portaient pas sur la création d’actions de préférences. Selon elle, celles-ci portaient sur la modification à la baisse des modalités de rémunération d'actions de préférence déjà existantes.  

La solution de la Cour de cassation 

L’arrêt de la Cour de cassation retient une solution à rebours de celle rendue par la cour d’appel de Lyon.  

D’une part, elle juge que : « lorsque les statuts d'une société par actions simplifiée ne prévoient pas les modalités selon lesquelles les droits attachés aux actions de préférence peuvent être modifiés, le consentement individuel des titulaires de ces actions est requis pour procéder à une telle modification. » 

Un tel principe a été déduit sur le fondement de l’ancien article 1134, al. 1 du Code civil. Cet article énonce le principe de force obligatoire des contrats (repris à l’actuel article 1103 du Code civil.). Aucun contrat ne peut être modifié sans le consentement préalable de chacune des parties sauf changement imprévisible de circonstances. 

D’autre part, elle considère que les modifications opérées sur les actions de préférence (« P ») s’analysaient comme une conversion d’actions au sens et pour l’application de l’article L 228-15, al. 2 du Code de commerce

Elle précise qu’une telle solution vaut « quand bien même ces actions continuaient d'être désignées sous le même intitulé. ». 

Elle en déduit les titulaires d'actions de préférence « P » n'auraient pas dû prendre part au vote portant sur la modification du dividende prioritaire attaché à ces actions.  Ainsi, les résolutions litigieuses étaient donc entachées de nullité. 

L’équipe du pôle Croissance Externe/Corporate se tient à votre disposition pour répondre à toutes vos questions en matière d’émission d’actions de préférence.