L’expert-comptable du CSE peut-il librement auditionner les salariés ?

L’expert-comptable désigné pour assister le CSE dispose d’une large autonomie dans l’accomplissement de sa mission, jouissant du libre accès aux locaux de l’entreprise (C. trav. art. L. 2315-82) ainsi que du droit à la communication de tous les documents nécessaires à l’exercice de sa mission (C. trav. art. L. 2315-83), à la condition qu’ils existent (Soc. 27 mai 1997, n°95-20.156, publié et Soc. 9 mars 2022, n°20-18.166).

Pour autant, l’expert-comptable est-il libre d’interroger les salariés ?

Se fondant sur les textes précités, la Cour de cassation répond par la négative dans cet arrêt publié du 28 juin 2023. Ainsi, elle affirme pour la première fois que l’expert-comptable désigné dans le cadre de la consultation sur la politique sociale de l’entreprise, qui souhaite auditionner des salariés, doit préalablement recueillir l’accord exprès de l’employeur et des salariés concernés

Une analyse qui va dans le sens des recommandations de l’Ordre des experts-comptables ainsi que d’une ancienne décision des juges du fond (TGI Paris, réf., 30 juill. 1984, n°84-7714).

En l’espèce, l’objet du litige portait sur la contestation par l’employeur de la durée et du coût prévisionnel de l’expertise, l’expert ayant prévu d’auditionner pendant 1h30 chacun des 25 salariés.

L’enjeu de l’expertise n’est cependant pas toujours uniquement son coût : le choix des salariés auditionnés est rarement neutre, notamment lorsque l’expertise a pour objet l’analyse d’un risque grave et matière de santé et de sécurité.

La portée de l’arrêt du 28 juin 2023 méritera donc d’être précisée. Même si la Cour vise les textes généraux sur les pouvoirs de l’expert, elle précise à plusieurs reprises que l’expert est désigné dans le cadre de la consultation sur la politique sociale.

La même solution pourra-t-elle s’imposer lorsque l’expertise aura pour objet l’analyse d’un risque grave en matière de santé et de sécurité ? Rien n’est moins sûr, et il est à craindre qu’un refus systématique ne s’apparente à un délit d’entrave.

Un sujet à suivre.

Le département droit social est à votre disposition pour tout complément d’information.

Soc. 28 juin 2023, n°22-10.293, publié