Aides d’Etat : la volonté des parties ne résiste pas aux exigences communautaires

Epilogue du contrat d’exploitation des services ferroviaires de la région ex-PACA pour la période 2006-2016, la CAA de Marseille, par un arrêt du 19 janvier 2022, SNCF Mobilités vient de se prononcer en rappelant la primauté de la lecture européenne en matière de contractualisation des services d’intérêt économique général (SIEG).

Sur le fond, SNCF Mobilités avait saisi le juge administratif sur un différend résultant de la divergence d’appréciation de son forfait de charges pour l’année 2016, qui avait abouti à ce que la Région prenne une délibération amputant la demande de l’opérateur de 48 M€.

Devant la Cour, le litige ne portait plus sur l’indemnisation mais sur la réformation du jugement qui avait annulé le contrat d’exploitation. Les juges d’appel ont confirmé cette annulation, en rappelant l’impact du droit communautaire concernant l’encadrement des aides d’Etat.

En premier lieu, la Cour rappelle que l’obligation d’encadrement des aides d’Etat - c’est-à-dire des versements effectués par les pouvoirs publics au titre de l’aide à l’exploitation de services publics – ne résulte pas uniquement du règlement européen 2007/1370 du 23 octobre 2007 qui encadre la passation des contrats de transport public, mais d’une jurisprudence plus ancienne de la CJUE, du 24 juillet 2003, Altmark Trans Gmbh, qui définit quatre conditions cumulative permettant d’échapper à la qualification d’aide d’Etat et donc à la notification préalable à la Commission européenne :

  • la définition claires des obligations de service public
  • la définition préalable des paramètres de compensation de ces obligations de façon objective et transparente,
  • l’absence de surcompensation
  • la sélection d’un opérateur par une procédure de marché (ou présentant des garanties équivalentes) et à défaut, de justifier que la compensation intervient après analyse des coûts et bénéfice que pourrait réaliser une entreprise moyenne bien gérée et adéquatement équipée

Si ces conditions ne sont pas réunies, l’aide doit être notifiée à la Commission qui examinera les mécanismes mis en place pour ne pas fausser la concurrence.

En l’espèce, la Cour administrative a examiné minutieusement les mécanismes financiers du contrat et retient notamment que l’absence ou l’insuffisance de séparation comptable des activités de la SNCF ne permet pas de s’assurer que ne niveau de coût reflète les charges réellement exposées.

La Cour confirme donc l’illégalité majeure du contrat et sa nullité.

Cette situation peut être d’autant plus grave que la Commission pourrait exigée la récupération des aides illégalement versées et engager une procédure d’infraction en cas de non-exécution : il est donc essentiel que les autorités concédantes soient vigilantes et prennent également en compte la philosophie européenne des mécanismes économiques des contrats.