L’administration fiscale peut opposer à une société les limitations statutaires aux pouvoirs de son dirigeant
Le directeur fiscal d’une société mère ne peut pas représenter une filiale devant le juge administratif, même muni d’un pouvoir d’agir en justice, dès lors que les statuts de la filiale imposent aux dirigeants de requérir l’autorisation du conseil de direction avant d’agir.
C’est ce que le Conseil d’Etat a rappelé dans une décision du 20 octobre 2021 (CE 20/10/2021 n°448563, Sté Transports du Val d’Oise c/ Ministère de l’économie).
Dans cette affaire, une société avait contesté une décision de l’administration fiscale devant le juge administratif refusant de la décharger d’une imposition. La filiale a été représentée à cette instance par le directeur fiscal de la société mère, qui était muni d’un pouvoir permanent d’agir en justice en matière fiscale accordé le directeur général de la filiale.
Malgré ce pouvoir, le Conseil d’Etat juge cette demande manifestement irrecevable. La juridiction a considéré que le pouvoir dont le directeur de la société mère était muni était insuffisant dès lors qu’une clause des statuts de la filiale prévoyait que, sauf urgence, le président et le directeur général de la filiale ne pouvaient agir en justice sans y avoir été autorisés par le conseil de direction et que la société n’avait pas justifié lors de la procédure d’une telle délibération.
Si les limitations de pouvoirs des dirigeants de SAS sont inopposables aux tiers, il a déjà été jugé que l’administration fiscale pouvait opposer à une société les limitations statutaires aux pouvoirs de son dirigeant (CE 12/01/1977 n°94706). Les juridictions civiles ont également la même approche puisque la Cour de cassation admet également que les tiers puissent se prévaloir d’une clause statutaire limitant le pouvoir des dirigeants pour soulever le défaut de pouvoir de ceux-ci à représenter leur société en justice (Cass. com. 14/02/2018 n°16-21.077 F-D).
Le contentieux administratif fait du pouvoir du représentant d’une personne morale une condition du droit d’agir sanctionnée par l’irrecevabilité du recours formé contre un acte administratif. En matière de procédure civile, le défaut de pouvoir du représentant d’une personne morale à un acte de procédure est un vice de fond entraînant la nullité de cet acte.
Il convient donc d’être vigilant dans la rédaction des statuts.