Cycle acquisition d’entreprise #2 : les étapes clés

Ainsi que cela a été détaillé dans l’article #1  du cycle que nous proposons sur l’acquisition d’entreprise « Acquérir une entreprise : le bon choix en fonction de son projet », le projet de reprise d’une société se dessine en plusieurs étapes, plus ou moins longues et complexes et pour certaines d’entre elles.

Afin de donner une idée générale de cette opération, nous décrivons ci-dessous les étapes clés d’une acquisition.

Cette opération complexe, s’inscrit dans un calendrier spécifique dont la durée courante, entre le début de la procédure de recherche de la société cible et l’acquisition finale de celle-ci, est en moyenne comprise entre 6 et 8 mois.

Etape 1 : Préparer son projet

Une reprise d’entreprise réussie s’anticipe et se prépare. Pour débuter et se lancer dans une telle opération ; il convient d’analyser ses objectifs pour bien définir son projet.

Les éléments économiques et financiers, tels que la conjoncture du secteur d’activité, le choix et les méthodes d’évaluation, le prévisionnel financier, etc. son importants dans la réussite de votre projet.

L’entreprise cible à reprendre doit correspondre à ces motivations, au diplômes du repreneur et au secteur d’activité choisi, à son expérience professionnelle, à ses propres ressources financières, à son budget global d’acquisition (prix de cession + frais de constitution + éventuellement le besoin en fonds de roulement, etc.) la taille d’effectifs souhaité ainsi que sa localisation.

Le projet doit être clair et mûr, afin de cibler le type de société cible.

Etape 2 : Rechercher la société cible

Une fois le premier travail personnel effectué, vient la recherche de la société cible à reprendre. Cette étape peut être complexe, car les chefs d’entreprise qui envisagent de céder leur titres restent souvent discrets sur leurs intentions dans le but de ne pas impacter négativement l’activité.

Il existe, toutefois, plusieurs solutions pour trouver une entreprise à reprendre et c’est souvent grâce à un réseau professionnel qu’il est possible de parvenir à trouver une opportunité de reprise. Il est ainsi possible d’activer son réseau familial ou amical ; il existe aussi des réseaux spécialisés dans le mise en relation vendeur/acquéreur. Ainsi, il est possible de s’adresser à des intermédiaires, se rapprocher d’experts, ou encore publier une « offre repreneur » sur les plateformes digitales de rencontres entrepreneuriales qui proposent un moteur de recherche, un algorithme de « matching » automatique et un chat pour échanger avec les cédants.

Etape 3 : La rencontre avec le cédant et la signature d’une lettre d’invention

Dès que la cible a été identifiée, il convient de l’analyser pour se faire une opinion plus précise et s’assurer de l’opportunité de faire une offre d’acquisition. Pour cela, il faut s’entretenir avec le chef d’entreprise qui souhaite vendre ses titres.

A cette occasion, il est nécessaire d’obtenir le maximum d’informations sur l’entreprise et son dirigeant :

  • Présentation détaillée de l’activité de la société et de ses perspectives d’avenir,
  • Quels sont les points forts et les points faibles de l’entreprise ?
  • Quelle est la clientèle de l’entreprise ? est-elle diversifiée ? les relations sont-elles contractualisées sur du long terme, du court terme ?
  • Le niveau d’activité est-il en déclin, stable ou en croissance ?
  • Comment se construit le chiffre d’affaires de l’entreprise ? Quels sont les outils de production ?
  • Présentation du personnel de l’entreprise, des postes stratégiques, de l’organigramme…
  • Pourquoi le chef d’entreprise souhaite céder ? Quand souhaite t’il céder ? Une transition est-elle envisageable ?
  • Quel est le rôle du dirigeant au sein de l’entreprise ? Son importance vis-à-vis des partenaires ?

Ce premier échange avec le chef d’entreprise cédant, permettra 

  • De se faire une idée du climat interne,
  • De vérifier le niveau d’information qu’il est prêt à communiquer sur son entreprise,
  • D’identifier le cœur du métier, les personnes clés, ,
  • De mesurer le degré d’urgence de la cession envisagée, les motivations profondes du cédant,
  • De repérer les personnes susceptibles d’influer sur sa décision.

L’ambiance des échanges, la facilité d’accès à l’information, l’implication dans le projet de cession sont autant de signaux qui indiqueront le niveau d’engagement du cédant à transmettre son entreprise.

A cette étape du process d’acquisition, il est normal que le cédant reste discret sur certains points et ne souhaite pas dévoiler des informations confidentielles, précises ou encore chiffrées, avant de recevoir une offre ou du moins une intention d’offre de l’acquéreur.

A l’issue de cette première rencontre avec le chef d’entreprise, si les discussions ont été positives, il conviendra d’aborder le prix demandé pour la cession.

Etape 4  : La signature d’une lettre d’intention et l’ouverture de la phase d’audit

Si à l’issue des premiers échanges avec le cédant, les informations recueillies confortent l’idée d’acquérir les titres de la société, l’acquéreur peut adresser au cédant une lettre d’intention afin de lui faire part de la proposition et de l’offre d’acquisition.

Cette lettre d’intention permet de formaliser certains éléments fondamentaux pour le cédant et l’acquéreur :

  • Le vendeur peut par exemple demander de clarifier et d’affirmer ses intentions avant d’ouvrir l’accès à de nouvelles informations plus confidentielles ;
  • Du coté de l’acquéreur il est possible d’obtenir un accord, au moins tacite, sur certains point clés avant d’engager des moyens d’étude et de passer du temps à la réalisation de l’audit d’acquisition de l’entreprise (aussi appelé due diligence).

La lettre d’intention permet alors de définir le cadre et les limites de la négociation ; les grands éléments de négociation y sont consignés. Elle permet, en outre, pour chaque partie, d’exprimer clairement ses intentions, d’ouvrir la phase d’audit et d’éventuellement parvenir à la conclusion d’un accord.

Selon l’avancée des discussions, le type de société reprise, selon le type d’informations obtenue, la lettre d’intention sera plus ou moins détaillée, et engageante pour toutes les parties.

Cette lettre d’intention clôt souvent un temps de négociation assez prenant pour toutes les parties et ouvre une période d’approfondissement de la connaissance de la société cible et du cédant avec la phase d’audit.

Etape 5 : L’ouverture de la phase d’audit

Suite à la signature de la lettre d’intention, il sera possible d’entamer la phase d’audit et de demander au cédant d’ouvrir ses comptes et de présenter l’organisation interne de l’entreprise pour que l’acquéreur puisse analyser de manière plus approfondie la situation de la société.

L’audit porte généralement sur les aspects financiers, juridiques, sociaux, commerciaux, techniques et environnementaux de la cible.

Cette étape est importante car elle doit permettre de déterminer une valorisation plus précise de la société à acquérir, afin de négocier ensuite les termes de l’opération de rachat.

Lors de cette étape, interviennent généralement, des experts-comptables, des avocats et des spécialistes techniques de l’activité de l’entreprise cible. Si le projet important, il est conseillé de se faire accompagner par un cabinet d’audit.

L’audit d’acquisition permet :

  • D’obtenir l’avis de tiers de confiance, il sera remis un rapport d’audit métier/juridique/financier ;
  • De détecter les risques liés à l’opération de reprise afin de prendre une décision en connaissance de cause ;
  • D’examiner les données comptables et financières de l’entreprise cible ;

Les conclusion de l’audit doivent permettre à l’acquéreur de décider de poursuivre ou non les négociations et d’obtenir sa propre estimation de la valeur de l’entreprise cible.

Le cas échéant, si le rapport d’audit fait apparaître certains risques, il sera possible de négocier avec le cédant une clause de garantie d’actif et de passif, notamment avec des modalités plus protectrices sur des points précis.

Les faiblesses pointées lors de la réalisation de l’audit pourront servir d’arguments dans les négociations liées au prix de vente et des solutions devront être prévues dans le plan de reprise.

Etape 6 : Le plan de reprise de la société cible

Après avoir diagnostiqué puis évalué la cible et conclut qu’une reprise pourrait être une belle opportunité, il conviendra de travailler un plan de reprise.

L’acquéreur aura alors à déterminer le montage juridique de l’opération de reprise et notamment à définir :

  • les modalités du rachat : constitution d'une holding de reprise pour la mise en place d’un montage LBO ; paiement immédiat, paiement échelonné, clause d’earn-out…
  • du sort des éventuelles dettes actuelles de l’entreprise,
  • du sort de l’éventuel compte courant d’associé du cédant,
  • des garanties actuelles sur les actifs,
  • de la garantie d’actif et de passif

En outre, il faudra déterminer le plan opérationnel et définir la stratégie à mettre en place suite au rachat de la société cible.

Aussi, afin de traduite financièrement le plan de reprise, un prévisionnel doit être établi. Celui-ci doit reprendre les données du dernier arrêté comptable (le plus récent possible) et traduit ensuite financièrement le projet de reprise sur trois années généralement. Un bilan et un compte de résultat prévisionnel, ainsi qu’un plan de financement et un tableau de trésorerie mensuel doivent être établis.

Il est conseillé pour cette étape de se faire accompagner par un expert-comptable, qui guidera l’acquéreur dans l’établissement du plan de reprise. D’autant plus que ce plan de reprise et le prévisionnel permettront de présenter le projet pour obtenir le financement nécessaire à l’acquisition.

Etape 7 : Le financement et les aides à la reprise d’entreprise

Le financement du projet de reprise d’entreprise résultera bien sûr de la combinaison de plusieurs facteurs.

Avant de se tourner vers un prêt bancaire, l’acquéreur peut renforcer son apport personnel, notamment :

  • en demandant le déblocage anticipé de son épargne salariale,
  • en bénéficiant de l’ARCE (aide à la reprise et à la création d’entreprise) : cette aide est égale à 45% du reliquat des droits à l’assurance chômage du créateur ou du repreneur au jour de la création ou de la reprise de l’entreprise,
  • en sollicitant un prêt d’honneur auprès de plateformes d’Initiative France ou du Réseau Entreprendre,
  • en faisant appel au crowdfundig. Le recours à ce mode de financement permet notamment de tester le potentiel du marché et l’accueil du public vis-à-vis du produit ou service. Attention toutefois, ce mode de financement n’est pas adapté à toutes les situations, surtout lorsque la reprise touche un secteur sensible, il peut aussi y avoir des difficultés quant à la confidentialité des données des clients et partenaires, en conséquence ce mode de financement reste assez rare dans le cadre de l’acquisition d’une entreprise.

Il existe d’autres modes de financement, tel que le crédit-vendeur. Dans ce cas, une partie du paiement du prix d’acquisition est échelonné, mais l’acquéreur est propriétaire des titres de la société cible dès la conclusion définitive de l'acte de cession. La durée du prêt est généralement fixée entre 1 et 3 ans.

Dans la majeure partie des cas d’acquisition avec financement, les acquéreurs se tournent vers les banques pour obtenir un prêt bancaire. Néanmoins les banques, selon la robustesse du projet peuvent demander des garanties ou des apports personnels complémentaires, en conséquence il est opportun de penser à ces modes de financement alternatifs.  

Etape 8 : La signature du protocole d’accord et levée des conditions suspensives

Le protocole d’accord peut être signé à différents moments à partir de la fin des audits et donc de la fixation définitive du prix et des conditions de garantie.

Il précise le calendrier et devient un engagement ferme pour les deux parties d’aller au terme du processus de reprise. Le protocole d’accord est une promesse synallagmatique entre le vendeur et l’acquéreur. L’acquéreur est donc d’accord avec le vendeur sur toutes les conditions essentielles de l’acquisition : prix ou formule de calcul du prix définitif, modalités de paiement, modalités de transition, la date de la cession définitive, la date de prise d’effet…

Le protocole d’accord retrace, en outre, les obligations du cédant et ses engagements jusqu’à la cession définitive. Il est en effet fréquent d’indiquer dans la promesse que le cédant devra poursuivre l’activité en bon père de famille et continuer à bien gérer la société. Il pourra être prévu dans le protocole que le vendeur ne devra pas se verser de dividende, qu’il ne devra pas effectuer des dépenses d’un certain montant sans l’accord préalable de l’acquéreur…

La garantie d’actif et de passif a d’ores et déjà été négociée et fait partie du protocole d’accord.

Cette promesse entre les parties, comprend surtout des conditions suspensives qui devront être levées avant une certaine date, afin que l’acquisition définitive soit réalisée.

Les conditions suspensives qui se trouvent généralement dans un protocole d’accord d’acquisition de société sont les suivantes :

  • purge du droit légal d’information des salariés. En effet, les salariés bénéficient d’un droit légal d’information sur le projet de cession. Pendant un délai de 2 mois, les salariés peuvent présenter une offre de reprise au cédant, ;
  • l’obtention du prêt bancaire ;
  • le remboursement éventuel du compte d’associé du cédant ;
  • si le cédant souhaite optimiser sa cession, la mise en place de certains montages : création d’une société holding pour effectuer une opération d’apport-cession, donation des titres cédés à ses enfants..

Ce n’est qu’une fois les conditions suspensives levées, que l’acquisition définitive des titres de la société sera possible.

La conclusion d’un protocole d’accord n’est pas toujours nécessaire, notamment si l’acquéreur détient suffisamment de fonds propres pour acquérir les titres de la société cible sans passer par un financement externe.

Etape 9 : L’acquisition définitive et l’éventuelle phase de transition

Après avoir signé le protocole d’accord avec le cédant, avoir obtenu une notification écrite des financeurs sollicités confirmant l’octroi de prêt et/ou autres financements et après que l’ensemble des autres conditions suspensives soient levées, l’acquéreur pourra s’engager définitivement et déclencher les procédures qui rendent le processus de reprise d’entreprise irréversible :

  • déblocage des fonds ;
  • signature de l’acte de cession définitive ;
  • signature de la garantie d’actif et de passif ;
  • versement du prix, éventuellement sur un compte séquestre notamment le temps d’obtenir du cédant la caution bancaire demandée dans le cadre de la garantie d’actif-passif ;
  • réalisation des formalités administratives de reprise de titres de société : enregistrement de la cession auprès de l’administration fiscale, éventuellement modification des statuts (dans cadre d’une acquisition de parts-sociales), signature des ordres de mouvement de titres et modification du registre des mouvements de titres (dans cadre d’une acquisition d’actions).

Lors des négociations, l’acquéreur a pu négocier avec le cédant qu’il soit présent un certain temps suite à l’acquisition définitive de la société afin qu’il l’accompagne dans les premiers mois de la reprise et qu’il fasse le lien avec les clients, les prestataires, les salariés. Cet accompagnement est bien sûr à privilégier pour que  la reprise et la transmission de la société se fassent en douceur.

Le cycle sur la reprise d’entreprise se poursuivra avec les prochains articles à venir :

  • #3 : Comment financer l’acquisition d’une société par un montage LBO
  • #4 : Sécuriser le prix de son acquisition (1/2) : le mécanisme de locked-box (clause d’ajustement de prix)
  • #5 : Sécuriser le prix de son acquisition (2/2) : le mécanisme de complément de prix (clause d’earn-out)
  • #6 : La garantie d’actif-passif pour couvrir les risques antérieurs à l’acquisition
  • #7 : Post-acquisition : la vie de la société reprise

L’équipe du pôle Croissance Externe/Corporate se tient à votre disposition pour vous accompagner dans votre projet d’acquisition d’une société et répondre à toutes vos questions.