La démocratisation de l’accès au matériel roulant ferroviaire en progression
L’accès au marché de l’exploitation du transport ferroviaire de voyageurs, suppose indéniablement un accès au matériel roulant ferroviaire.
Le législateur a envisagé une solution à court terme, à savoir la reprise en propriété du matériel roulant par les autorités organisatrices ferroviaires, Etat ou régions.
Néanmoins, l’accès au matériel roulant soulève des problématiques à long terme.
La solution à court terme envisagée par le législateur : la reprise de propriété du matériel roulant de SNCF Voyageurs par les autorités organisatrices
L’article 21 I de la loi pour un nouveau pacte ferroviaire (loi n°2018-515 du 27 juin 2018) prévoit le droit pour les autorités organisatrices de transport ferroviaire de reprendre la propriété du matériel roulant de SNCF Voyageurs utilisé pour l’exécution d’un contrat de service public attribué sans mise en concurrence.
En effet, l’article 21 fait référence au matériel roulant utilisé dans le cadre d’un contrat attribué en application de l’article L.2141-1 du Code des transports dans sa version en vigueur antérieure au 25 décembre 2023. Or, cette version est celle autorisant SNCF Voyageurs à exploiter sans mise en concurrence le transport ferroviaire de voyageurs.
Les problématiques à plus long terme
Ce dispositif est adapté à court terme pour l’organisation de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs.
En revanche, une fois les contrats attribués après une première mise en concurrence, les autorités organisatrices vont devoir prendre position sur l’acquisition, le financement et la propriété du matériel roulant :
- A renouveler en cours de contrat
- Nécessaire à l’exploitation du transport ferroviaire dans le cadre d’un contrat de service public faisant suite à un premier contrat attribué après mise en concurrence
Les solutions possibles et les positions à prendre
Aussi, malgré la solution favorable à une large concurrence envisagée par le législateur, les autorités organisatrices doivent d’ores et déjà s’interroger sur les modalités d’acquisition, de financement et de propriété de matériel roulant nécessaire à l’exploitation d’un contrat de service public (en complément du matériel roulant de SNCF Voyageurs ou pour le renouvellement de matériel en fin de vie) en envisageant différents scénarios :
- Elles financent et sont propriétaires du matériel roulant ce qui pose la question de leur responsabilité dans le cadre de l’acquisition et la mise à disposition
- Elles créent une entité chargée de l’acquisition et de la mise à disposition du matériel roulant
- Elles recourent à une entité tierce (supposant une mise en concurrence éventuelle) pour que cette entité mette à disposition du matériel roulant auprès des différents entreprises ferroviaires qu’elle aura retenues dans le cadre d’une mise en concurrence pour l’exploitation de leur réseau ferroviaire
- Elles demandent à l’entreprise ferroviaire exploitante de mettre à disposition du matériel roulant ferroviaire dont elle est ou non ferroviaire
S’agissant du deuxième scénario, l’Autorité de régulation des transports considère que les régions ne sont pas encore prêtes à créer de telles structures s’apparentant aux aux Rosco (Rolling Stock Companies), entités spécialisées dans la location de matériels roulants.
S’agissant des deux derniers scénarios, il pourra s’agir de s’appuyer sur des Rosco existantes qui connaissent un certain succès en Europe. Une association fédérant ces loueurs a récemment vu le jour : l’AERRL (Association of European Rail Rolling Stock Lessers) regroupant Akiem, Mitsui Rail Capital Europe (MRCE), Rail pool et Northrail.
Le succès de telles structures dépendra clairement de la garantie d’une interopérabilité du réseau ferroviaire au sein des Etats membres (grâce notamment à l’ERTMS-ECTS) et de la mise en œuvre unanime et harmonisée des spécifications techniques d’interopérabilité par les constructeurs de matériels roulants.