Quel délai pour exercer un recours administratif préalable obligatoire ?

CE, 31 juillet 2025, n°499513, Tables Lebon

En matière d’urbanisme, l’illustration la plus fréquente de recours administratif préalable obligatoire (RAPO) est celle prévue à l’article R.424-14 du code de l’urbanisme, dont il résulte qu'un pétitionnaire n'est pas recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision de refus de permis de construire faisant suite à un avis défavorable de l'architecte des bâtiments de France sur sa demande de permis s'il n'a pas, au préalable, saisi le préfet de région d'un recours contre cet avis. Le délai pour former ce RAPO est de deux mois.

L’arrêt CE, 31 juillet 2025, n°499513 ici commenté précise le délai dans lequel ces RAPO doivent être présentés lorsque le destinataire de la décision n’a pas été informé de cette obligation.

L’espèce concerne les dispositions de l’article R.14-14 du code de l’urbanisme mais la solution dégagée paraît pouvoir être transposée à tous les RAPO, au vu de la rédaction de l’arrêt.

Tout d’abord, le Conseil d’Etat rappelle les deux principes sur lesquels se fondent sa décision.

D’une part, vertu de l'article L. 412-3 du code des relations entre le public et l'administration et de l’article R.421-5 du code de justice administrative, la notification d’une décision doit, s'agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l'autorité devant laquelle il doit être porté.

En l’absence d’une telle information, le délai n'est pas opposable.

Néanmoins, d’autre part, le Conseil d’Etat relève que le principe de sécurité juridique implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps. Il ajoute que dans le cas où le recours juridictionnel doit obligatoirement être précédé d'un recours administratif, celui-ci doit être exercé, comme doit l'être le recours juridictionnel, dans un délai raisonnable.

La solution dégagée par la Haute Juridiction concilie ces deux principes. Elle maintient en tous les cas la nécessité de faire précéder d’un RAPO le recours contentieux.

Ainsi, le Conseil d’Etat décide que le délai raisonnable pour former un RAPO est interrompu par un recours contentieux même s’il n’a pas été précédé du RAPO. Néanmoins, le délai pour former ensuite le RAPO commence à courir dès la première décision juridictionnelle rejetant pour irrecevabilité le recours contentieux. Sa durée est déterminée par le texte prévoyant le RAPO :

« Lorsque le destinataire d'une décision administrative individuelle n'a pas été informé […] de l'existence d'un recours administratif préalable obligatoire, du délai imparti pour le présenter et de l'autorité devant laquelle il doit être porté, et qu'ainsi le délai normalement applicable ne lui est pas opposable, l'exercice d'un recours juridictionnel contre cette décision, s'il est lui-même formé dans les délais, interrompt le cours du délai raisonnable dont il disposait alors pour former un recours administratif préalable obligatoire. Le délai imparti par le texte applicable pour présenter un recours administratif préalable obligatoire commence à courir à compter de la notification de la première décision juridictionnelle qui rejette pour irrecevabilité le recours contentieux au motif qu'il n'a pas été précédé d'un tel recours ».

Dans le cas d’espèce, le requérant s’était vu opposé des refus de permis de construire le 27 août 2020, suite à des avis défavorables de l’ABF.

Il n’avait pas formé de RAPO, l’information qui lui avait été donnée étant insuffisante.

Il avait en revanche contesté devant le juge administratif les refus de permis et obtenus leur annulation par un jugement de première instance du 13 juillet 2021.

Cependant, en appel, par un arrêt du 27 février 2022, la demande d’annulation des refus de permis de construire a finalement été rejetée au motif que le requérant n'avait pas, préalablement à sa saisine du tribunal administratif, présenté un RAPO.

Par la suite, le requérant a formé un recours administratif le 25 juillet 2023 contre les avis défavorables de l’ABF. Ces recours administratifs ayant été rejetés, il a alors à nouveau saisi le juge administratif d’une demande d’annulation des trois refus de permis de construire. Mais ces recours ont à leur tour été rejetés pour irrecevabilité, au motif qu’il n'avait pas formé le RAPO dans le délai raisonnable d'un an à compter de la date à laquelle il avait eu connaissance des décisions de refus de permis de construire.

Le requérant a alors formé un pourvoi en cassation, rejeté par le Conseil d’Etat qui, pour autant, ne confirme pas le raisonnement des premiers juges.

En effet, pour constater l’irrecevabilité du nouveau recours contre les refus de permis de construire, le Conseil d’Etat ne retient pas l’expiration du délai raisonnable comme les premiers juges.

Il relève en revanche que le RAPO aurait dû être formé, en application de l’article R.424-14 du code de l’urbanisme, dans le délai de deux mois suivant la notification de l’arrêt de la Cour administrative d’appel du 27 février 2022, première décision qui avait retenu l’irrecevabilité.

Tel n’était pas le cas en l’espèce, le RAPO n’ayant finalement été présenté que le 25 juillet 2023.

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