Détournement d’informations : faute séparable des fonctions du dirigeant

Par arrêt du 7 septembre 2022, la Cour de Cassation a considéré qu’engage sa responsabilité, le dirigeant qui détourne des informations de la société dont il était salarié (Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 7 septembre 2022, 20-20.404 20-20.538).

Pour mémoire, l’article L223-22 du Code de commerce prévoit que « les gérants sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les tiers, soit des infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion ».

La jurisprudence a exigé que de telles fautes soient qualifiées de séparables de ses fonctions, ce qui nécessite la démonstration de trois critères : faute intentionnelle, d’une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales de ses fonctions (Cour de Cassation, Chambre commerciale, 20 mai 2003, 99-17.092).

C’est ce qu’a considéré, en l’espèce, la Cour de Cassation en relevant que « M. [H] était à l'origine du détournement déloyal d'informations confidentielles relatives à l'activité de la société Europe et communication dont il était antérieurement salarié, et que ce détournement avait été opéré au profit de la société Enez Sun, qu'il avait créée en février 2008 à la suite de son départ de la société Europe et communication, faisant ainsi ressortir la commission intentionnelle d'une faute d'une particulière gravité, incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ».

A noter qu’en l'absence de faute séparable des fonctions, le tiers lésé ne peut engager la responsabilité personnelle du dirigeant, et, doit engager la responsabilité de la société.

A noter que ce type de tels agissements peuvent également être constitutifs de l’action en concurrence déloyale, action pour laquelle aucun élément intentionnel n’est requis.

C’est d’ailleurs ce qu’a considéré, dans cette affaire, la Cour d’appel de Dijon en condamnant la société (constituée par l’ancien salarié) au paiement de la somme de 300 000€.

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Le détournement d’informations confidentielles par un ancien salarié est donc sanctionnable sur différents fondements : concurrence déloyale, faute séparable des fonctions du dirigeant, mais aussi, sur le terrain de l’abus de confiance. Ainsi, la Cour de Cassation a considéré que « constitue un abus de confiance le fait, pour une personne, qui a été destinataire, en tant que salariée d'une société, d'informations relatives à la clientèle de celle-ci, de les utiliser par des procédés déloyaux dans le but d'attirer une partie de cette clientèle vers une autre société » (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 22 mars 2017, 15-85.929).

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