Compte courant : le remboursement peut constituer une faute de gestion

  1. L'arrêt du 21 octobre 2021

Quand bien même la société dispose au moment du remboursement des liquidités suffisantes pour y procéder, rembourser le compte courant d’associé constitue une faute de gestion dès lors qu’il intervient dans un contexte de difficulté financière pour la société et qu’il la prive de trésorerie suffisante pour le paiement de ses créanciers et son activité.

Dans la première affaire, l’associé gérant d’une SARL, a procédé au remboursement de son compte courant d’associé en décembre 2014. La société a été mise en liquidation judiciaire en mai 2015 et la date de cession des paiements est fixée au 28 avril 2015.

Le liquidateur a recherché la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d’actif. La Cour d’appel pour écarter la responsabilité du gérant au titre de l’insuffisance d’actif a retenu que le jour où le compte courant d’associé a été remboursé, les comptes bancaires de la société présentaient un solde créditeur d’une somme supérieure au montant du remboursement.

Pour la Cour de cassation dans cet arrêt du 20 octobre 2021 (n°20-15.736 F-D), ce n’est pas suffisant. Elle casse l’arrêt et juge les motifs retenus par la cour d’appel impropres à exclure la faute du gérant, auquel il était reproché d’avoir remboursé son compte courant en parfaite connaissance des difficultés financières de la société pour privilégier sa situation personnelle.

A noter que sauf convention contraire un associé peut demander à tout moment le remboursement de son compte courant.

2. Rappel de la jurisprudence

En principe la société ne peut pas invoquer une situation financière difficile pour s’y opposer (CA Aix-en-Provence 06.07.2017 n°15/05231) ni limiter le remboursement au montant que peut supporter sa trésorerie (Cass.com. 08.12.2009 n°08-16.418 F-D).

Le dirigeant peut cependant, dans certaines circonstances être condamné à combler le passif social pour avoir remboursé son compte courant, même si la jurisprudence est rare en la matière.

Il a par exemple été jugé que constitue une faute de gestion le fait pour un gérant de faire passer ses intérêts avant ceux de la société en prélevant les fonds de son compte courant pour acquérir en propre un bien immobilier (Cass.com 01.07.2008 n°07-16.215 F-D) ou alors qu’il savait inéluctable la déclaration de cessation des paiements et qu’il connaissait le risque que la société doivent une somme d’argent à un tiers dans le cadre d’un contentieux (Cass.com 24.05.2018 n°17-10.119).