La confidentialité contrôlée au travers du référé précontractuel

L’article L 77-13-1 du Code de justice administrative instaure un pouvoir d’action spécifique du juge administratif pour cesser les atteintes au secret des affaires. L’information protégée doit, selon la définition donnée par l’article L 151-1 du Code de commerce, répondre à trois critères :
- 1° Elle n'est pas, en elle-même ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d'informations en raison de leur secteur d'activité ;
- 2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;
- 3° Elle fait l'objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret.
L’article R 557-3 du Code de justice administrative, donne pour sa part au juge administratif le pouvoir de faire cesser en référé, au besoin sous astreinte, toute atteinte à ce secret par des mesures proportionnées.
Par son arrêt du 10 février 2022, CHU de Pointe-à-Pitre, le Conseil d’Etat donne des précisions sur son articulation avec le référé précontractuel.
A l’occasion de sa participation à un appel d’offres relatif à des prestations d’assurance pour le compte du CHU de Pointe-à-Pitre, la société SHAM a constaté que le CHU était accompagné d’une assistance à maitrise d’ouvrage qui, selon la SHAM était en lien étroit avec l’un de ses concurrents et a saisi le jufe de référés pour interdire au CHU l’interdiction de transmettre son offre à l’AMO. Le Juge des référés du Tribunal a écarté le jeu de la clause de confidentialité figurant dans le marché de l’AMO en considérant que la demande était formulée à l’encontre du CHU et a fait droit à la demande de la SHAM.
Le Conseil d’Etat, saisi en tant que juge de cassation, a annulé l’ordonnance pour erreur de droit, en retenant précisément que la présence d’une clause de confidentialité dans le marché d’assistance devait être pris en compte. Réexaminant l’affaire, le Conseil d’Etat estime que l’engagement de confidentialité est un élément probant, en l’absence d’autres indices de manque d’impartialité, et suffisant pour écarter un risque d’atteinte imminente au secret des affaires.
Mais le Conseil d’Etat précise opportunément les liens entre ce référé et le référé précontractuel lorsque la protection du secret est mise en cause à l’occasion d’une procédure de mise en concurrence. A cet égard, le Conseil rappelle qu’il appartient au candidat qui dispose d’éléments suffisamment probants de faire valoir une violation par le pouvoir acheteur du secret des affaires ou du principe d’impartialité, étant rappelé que pour ce dernier, le simple risque peut être sanctionné (CE,20 octobre 2010, Corsica Networks).