La réalisation de la ligne ferroviaire nouvelle entre Montpellier et Béziers est d’utilité publique

Par une décision en date du 2 février 2024, le Conseil d’Etat a rejeté la requête formée à l’encontre du décret n° 2023-111 du 26 février 2023 déclarant d'utilité publique et urgents ces travaux relatifs à la réalisation de la ligne ferroviaire nouvelle entre Montpellier et Béziers

Comme il est d’usage dans cette matière, les moyens soulevés étaient assez nombreux. Nous nous concentrerons sur la légalité interne.

De manière classique, le Conseil d’Etat rappelle qu’une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier, les inconvénients d'ordre social, la mise en cause de la protection et de la valorisation de l'environnement et l'atteinte éventuelle à d'autres intérêts publics qu'elle comporte, ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente.

Dans le cas d’espèce, le raisonnement se déployait en trois temps successifs.

1°) Examen de l’intérêt opérationnel

L’élément principal de l’argumentation des requérants reposait sur le gain de temps faible résultant de la nouvelle ligne.

La réalisation de l'ensemble de la ligne ne permet en effet qu’un gain de temps de 38 minutes sur le trajet Paris-Barcelone. Le moyen paraissait efficace, car le gain de temps peut raisonnablement être considéré comme l’un des avantages principaux que l’on attend de la création d’une nouvelle ligne de train.

Mais ce n’est pas l’analyse du Conseil d’Etat, qui a retenu les avantages suivants :

  • la réalisation de cette ligne doit permettre, en décongestionnant l'unique axe ferroviaire existant de la façade méditerranéenne, une amélioration de l'offre de service ferroviaire aux voyageurs de nature à faciliter le report sur ce mode de transport et un renforcement de la capacité de transport de fret ;
  • elle doit également permettre d'améliorer le cadre de vie des habitants en éloignant le trafic lié au fret des zones fortement urbanisées traversées par la ligne existante ;
  • le tracé retenu, moins exposé aux aléas climatiques que celui de la ligne existante, doit également permettre d'améliorer la fiabilité du réseau ferré dans cette zone.

2°) Examen des atteintes portées à l’environnement

Les requérants indiquaient que le projet de ligne ferroviaire nouvelle entre Montpellier et Béziers avait des incidences sur la faune et la flore, les zones humides dont notamment l'étang de Thau, les surfaces agricoles ainsi que sur le paysage, notamment au niveau du viaduc de Poussan.

Le Conseil d’Etat ne conteste pas l’existence de ces inconvénients. Mais il souligne que le maître d'ouvrage a prévu des mesures destinées à les prévenir, les réduire ou les compenser dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles seraient insuffisantes.

Cette forme d’examen fait ressortir l’importance des mesures compensatoires. Il faut toutefois noter que la motivation de la décision du 2 février 2024 est très brève sur ce point, ce qui pourrait laisser à penser que l’examen de la juridiction administrative n’a pas été très poussé.

La technicité de ces mesures peut expliquer que le juge administratif soit quelque peu démuni pour en vérifier, par lui-même, le caractère suffisant.  Or, la charge de la preuve repose sur les requérants qui ne disposent pas toujours des moyens humains et techniques pour contester de manière étayée et efficace le contenu de l’étude d’impact. Cela peut expliquer la relative faiblesse du contrôle exercé.

3°) Examen de la rentabilité du projet

Il ressortait enfin du dossier soumis à l’enquête publique, que le coût de l’opération était de 2, 04 milliards d’euros. La commission d’enquête avait d’ailleurs assorti son avis d'une recommandation visant à ce que la clé de financement soit, sans faire appel aux collectivités territoriales, complétée avant la déclaration de l'utilité publique.

Cependant, les pièces du dossier faisaient ressortir une rentabilité socio-économique nettement positive.

Le Conseil d’Etat juge aussi que la recommandation de la commission d’enquête ne suffisait pas retirer à l’opération son caractère d’utilité publique et souligne à cet égard que la répartition envisagée des financements entre l'Etat, l'Union européenne et les collectivités territoriales était, déjà connue.

Découvrez la décision complète du Conseil d'État sur l'utilité publique de la réalisation de la ligne ferroviaire Montpellier-Béziers : Réf. : CE, 02/02/2024, req. n°473429.