CONTENTIEUX DES AUTORISATIONS D’URBANISME

Appréciation de la condition d’urgence en matière de référé suspension

Le contentieux des autorisations d’urbanisme est régi par plusieurs règles spécifiques. Il en va ainsi notamment des conditions dans lesquelles un référé suspension peut être formé à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme.

Il ressort de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative que le juge administratif peut suspendre l’exécution d’un acte administratif lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision.

L’article L. 600-3 du Code de l’urbanisme précise qu’un recours dirigé contre autorisation d’urbanisme ne peut être assorti d'une requête en référé suspension que jusqu'à l'expiration du délai fixé pour la cristallisation des moyens soulevés devant le juge saisi en premier ressort.
La condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du Code de justice administrative est présumée satisfaite.

L’article R. 600-5 du Code de l’urbanisme dispose quant à lui, que « les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense ».

En dehors du contentieux des autorisations d’urbanisme, aucun texte ne fixe de limite de temps pour introduire un référé suspension. Néanmoins, la diligence à saisir le juge des référés est considérée comme un élément dans l’appréciation du respect de la condition d’urgence. C’est le sens de l’ordonnance du Conseil d’État 6 novembre 2003, Association AC !, requête n° 261518 et de la décision du même juge du 15 novembre 2005, Sté Fiducial Audit et Sté Fiducial Expertise, requête n° 286665.

La question pouvait donc se poser de savoir si le défaut de diligence à saisir le juge des référés pouvait de même faire obstacle à la suspension de l’acte attaqué en matière d’autorisation d’urbanisme. L’enjeu est d’autant plus important lorsque la commune ou le bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme tarde à produire un mémoire en défense, reculant d’autant le point de départ du délai de cristallisation des moyens.

Le Conseil d’État considère que l’absence de diligence des requérants à saisir le juge des référés n’est pas de nature, à elle seule, à renverser la présomption d'urgence prévue par l'article L. 600-3 du Code de l'urbanisme.

Cela étant précisé, au cas d’espèce, le Conseil d’État rejette tout de même le référé suspension, au motif qu’il avait été introduit après l’expiration du délai de cristallisation des moyens. Il précise à cette occasion, que ce délai peut être déclenché par la production du mémoire en défense de l’un quelconque des défendeurs à l’instance, sans qu’il soit nécessaire que la commune et le pétitionnaire aient tous les deux présentés des écritures en défense.

Conseil d’État, 6 octobre 2021, requête n° 445733