Garantie d’éviction : l’obligation légale de non-concurrence n’est pas absolue
Par un arrêt du 10 novembre 2021, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler les critères applicables à la mise en jeu d’obligation de non-concurrence dans le cadre de la garantie légale d’éviction.
Dans cette affaire, le contrat de cession ne comportait pas d’obligation contractuelle de non-concurrence. Toutefois, le cédant a considéré que les cessionnaires avaient manqué à la garantie légale d’éviction (article 1626 du Code civil) aux motifs que :
- les cessionnaires s’étaient réinstallés, par l’intermédiaire d’une nouvelle société, pour proposer des services concurrents.
- les cessionnaires s’étaient réappropriés une partie du code source du logiciel commercialisé par le cédant.
- les cessionnaires avaient débauché une partie du personnel du cédant.
- de tels agissements avaient abouti à un détournement de clientèle.
La Cour d’appel de Paris, par arrêt du 1er décembre 2020, avait approuvé un tel raisonnement.
Cet arrêt de la Cour d’appel de Paris est cassé aux motifs qu’ « en se déterminant ainsi, après avoir constaté que M. [N] avait créé la société Blue Mind plus de trois ans après la cession des actions, que M. [W] n'avait rejoint cette société que quatre ans après la cession et que les contrats en cours lors de la cession étaient à durée déterminée, sans rechercher concrètement si, au regard de l'activité de la société dont les parts avaient été cédées et du marché concerné, l'interdiction de se rétablir se justifiait encore au moment des faits reprochés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ».
Ainsi, la Cour de cassation rappelle que l’obligation de non concurrence, issue de la garantie légale d’éviction, n’est pas absolue et considère que « si la liberté du commerce et la liberté d'entreprendre peuvent être restreintes par l'effet de la garantie d'éviction à laquelle le vendeur de droits sociaux est tenu envers l'acquéreur, c'est à la condition que l'interdiction pour le vendeur de se rétablir soit proportionnée aux intérêts légitimes à protéger».
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Cour de cassation - Chambre commerciale — 10 novembre 2021 - n° 21-11.975