ABUS DE MINORITÉ

L’abus de minorité nécessite la démonstration de la poursuite du seul intérêt personnel des associés minoritaires

Afin de permettre la désignation d’un mandataire ad hoc en charge de voter à une assemblée générale au nom de l’associé minoritaire, il est nécessaire de démontrer un abus de minorité de la part de l’associé minoritaire lors d’un précédent vote sur le même sujet en assemblée générale.

Le vote constitue un abus de minorité lorsque l’associé minoritaire a adopté une attitude contraire à l’intérêt général de la société en interdisant une opération essentielle pour celle-ci dans l’unique but de favoriser ses intérêts au détriment des autres associés.

La Haute Juridiction a été amenée à rappeler, dans un arrêt du 9 juin 2021, la nécessité de la démonstration des agissements de l’associé minoritaire dans son seul intérêt.

Dans l’affaire présentée à la Cour de cassation, des associés minoritaires avaient voté en assemblée générale contre le projet de vente d’un bien immobilier de la société jugée nécessaire pour dégager de la trésorerie. La particularité était que la société donnait à bail ledit bien immobilier et que les loyers faisaient l’objet d’une saisie attribution au profit desdits associés minoritaires.

Pour la Chambre Commerciale de la Cour de cassation, il est nécessaire de démontrer « en quoi le refus de M. [Y] [N] de voter pour la vente du bien litigieux procédait de l'unique dessein de favoriser ses propres intérêts au détriment des autres associés, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. »

L’atteinte à l’intérêt social de la société, en cas de refus de voter la vente d’un bien de la société, nécessaire pour le règlement de ses dettes, n’est pas contesté. Pour autant, la Haute Juridiction rappelle la nécessité de démontrer également que ce vote a été réalisé dans le seul intérêt de l’associé minoritaire. En cas de vote contre une augmentation de capital, cet intérêt personnel peut se justifier, d’une manière générale, par le souci de ne pas être dilué. Dans le cadre du refus de la vente d’un bien, la question est plus originale puisque, sauf disposition contraire des statuts, la vente d’un bien de la société relève de la compétence des organes de gestion et non de l’assemblée générale. Cette démonstration dépendra de chaque cas d’espèce.

Cour de cassation, chambre commerciale, 9 juin 2021, pourvoi n° 19-17.161