SNCF Connect : il n’est pas poli de demander la civilité
Epilogue d’un bras de fer entre l’association Mousse et le portail client SNCF Connect, la décision du Conseil d’Etat du 31 juillet 2025 relative à la demande de civilité en cas de commande de billets ou de services intéresse également l’ensemble des plateformes de distribution.
L’association MOUSSE a déposé une plainte auprès de la CNIL contre SNCF Connect (anciennement OUI.sncf), estimant que la collecte obligatoire de la civilité (« Monsieur » ou « Madame ») lors de l’achat de billets en ligne violait le RGPD.
La CNIL a rejeté la plainte en mars 2021 et l’association a saisi le Conseil d’Etat aux fins d’annuler la décision de rejet, sollicitant de saisir le CJUE d’une question préjudicielle sur l’interprétation du règlement européen du 27 avril 2016 relatif au traitement des données des personnes physiques, le « RGPD », transposé en droit français par la loi du 20 juin 2018.
En effet, le règlement européen impose de collecter des données à des fins déterminées (article 5) et pour des usages licites (article 6), parmi lesquels la nécessité de l’information pour l’exécution d’une prestation de service sollicitée par la personne physique ou d’un intérêt légitime pour l’entreprise traitante.
Ces fondements étaient ceux retenus par la CNIL, celle-ci précisant que « le traitement de la civilité pourrait en outre être regardé comme nécessaire aux fins des intérêts légitimes poursuivis par la société SNCF Connect au sens du f) du 1 de l'article 6 et que, dans ce cas, les personnes concernées pourraient, en fonction de leur situation particulière, faire valoir le droit d'opposition qui leur est garanti par l'article 21 ».
Tel n’a pas été l’analyse de la CJUE, saisi par le Conseil d’Etat, qui, par arrêt du 9 janvier 2025 a retenu d’une part, que le traitement de données à caractère personnel relatives à la civilité des clients d’une entreprise de transport, ne paraît ni objectivement indispensable ni essentiel afin de permettre l’exécution correcte d’un contrat et d’autre part, que l’existence d’un droit s’opposition ne peut être pris en considération pour justifier un traitement.
Par sa décision du 31 juillet, le Conseil d’Etat a tiré les conséquences de ces avis et a pédagogiquement rappelé que si certains services justifiaient la demande de civilité (par exemple pour les voitures « femmes » des trains de nuit), cela ne permettait pas de solliciter la donnée pour l’ensemble des services.
De même, si la communication commerciale ciblée permet de solliciter le genre, le respect du RGPD impose pour sa part de laisser au moins la faculté à toute personne de ne pas répondre.
Ainsi, à l’ère du Maas, où les entreprises de transport et les distributeurs de titres repensent leurs offres vers plus de services adaptés et personnalisés, le respect de l’accès aux données personnelles, qui comprend un régime de sanctions financières, ne doit pas être sous-estimé.
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