Le transport ferroviaire, levier du désenclavement territorial : un rapport parlementaire propose une stratégie nationale

Adopté le 15 octobre 2025, le rapport d’information sur le rôle du transport ferroviaire dans le désenclavement des territoires souligne l’urgence d’une nouvelle politique cohérente et constante du rail, en faveur d’une décarbonation des mobilités et d’une prise en compte de l’aménagement du territoire.

Porté par M. Peiro DUFAU, député SOC des Pyrénées-Atlantiques, par M. Bérenger CERNON, député LFI-NFP de l’Essonne et Mme Olga GIVERNET, députée EPR de l’Ain, le rapport se veut porteur d’une « stratégie ferroviaire de long terme ». Ils font plusieurs constats et préconisations.

Un réseau sous tension, entre sous-investissement et ouverture à la concurrence

Les financements récents sur l’infrastructure restent insuffisants, entraînant une inéluctable fragilisation du réseau ferroviaire. Sans hausse des crédits investis dès 2028, la mission dénonce le risque d’une « spirale de paupérisation industrielle ».

L’ouverture à la concurrence, si elle stimule l’offre sur les lignes à grande vitesse rentables entre les grandes métropoles françaises, menace le modèle français originel - et original - de service public visant à une péréquation entre lignes rentables et déficitaires : « la bonne santé de certaines dessertes permettait de financer l’existence des autres ».

Les rapporteurs appellent à envisager une autre articulation entre l’offre à grande vitesse et l’offre de TER afin de tenir compte de l’aménagement du territoire, « angle mort de l’ouverture à la concurrence ». Plus largement, ils recommandent de sortir de la logique du « tout TGV », qui ne profite pas à toute la population.

En outre, l’ouverture à la concurrence entraîne des difficultés par le morcellement de l’offre ferroviaire qui complexifie le quotidien des usagers (continuité des parcours, billettique).

Un enjeu écologique évident

Les rapporteurs notent que les transports représentent 34 % du total des émissions de gaz à effet de serre (GES) en 2023, dont94 % des émissions du secteur des transports proviennent du transport routier. 53 % de ces dernières proviennent des voitures des particuliers.

Si le transport ferroviaire a une empreinte écologique moindre, il ne compte que pour 11,4 % de l’ensemble des kilomètres parcours, soit 4 fois moins que le nombre de kilomètres réalisés en voiture. En Suisse ou en Allemagne, cette part modale du transport ferroviaire de voyageurs est de 20 %, voire de 30 % en Autriche.

Le transport de voyageurs connaît un regain d’intérêt flagrant (confort, facilité d’accès aux centres-villes, coût écologique). Toutefois, les prix restent élevés voire prohibitifs pour une large partie de la population.

La baisse considérable du transport du fret sur rail depuis 25 ans

Le rapport souligne que les volumes de marchandises transportés par rail ont diminué de 43 % depuis 2000.

Malgré ses atouts (aménagement du territoire, environnement, sécurité, développement économique) et les appels à son développement régulier dans le débat public, le modèle du fret ferroviaire est marqué par d’importantes charges fixes qui pèsent sur la compétitivité face au transport routier de marchandises, réputé plus flexible et réactif.

Les députés préconisent ainsi un développement du transport combiné rail-route, plus adapté aux besoins des chargeurs, de revoir le système de réservation des sillons ou encore de se pencher sur la problématique de saturation des terminaux ferroviaires. 

Ils relèvent également que l’ouverture à la concurrence du fret ferroviaire en France est intervenue en 2006 et a déstabilisé l’opérateur historique, Fret SNCF. Près de 25 ans plus tard, le marché ne s’est toutefois pas encore réorganisé. La société Hexafret, qui a repris 80 % de l’activité de Fret SNCF au 1er janvier 2025 ouvrira son capital à partir de 2026. 

Les rapporteurs s’inquiètent également de la nouvelle règlementation européenne sur les méga-camions, qui risquerait d’entraîner un report modal inversé, au détriment du fret ferroviaire.

Parmi les priorités mises en avant, le rapport préconise :

  1. Régénérer et moderniser le réseau : +1 milliard €/an nécessaires dès 2028 pour enrayer le vieillissement et la « spirale de paupérisation industrielle », dans un contexte financier difficile comme le souligne l’ART : « la possibilité d’un autofinancement des investissements sur le réseau par le gestionnaire d’infrastructure apparaît hors de portée » ;
  1. Donner un cap et le suivre : en cas d’investissement, des engagements de long terme crédibles, pilotés et priorisés devront être assurés. Cette absence de gouvernance fait cruellement défaut aujourd’hui ;
  1. Assurer un financement stable et coordonné : recours à la Caisse des dépôts, éco-contribution routière, application intégrale de la directive Eurovignette ;
  1. Rééquilibrer l’offre ferroviaire : sortir du « tout TGV » au profit des trains du quotidien, des RER métropolitains et du fret combiné rail-route ;
  1. Provoquer un « choc d’offre » : plus de trains, avec plus de fréquence, plus d’amplitude horaire et sur des territoires plus étendus.

44 recommandations pour une politique ferroviaire de long terme

Les députés appellent notamment à :

  • Insérer le train dans une logique d’intermodalité, pour faciliter le transport de voyageurs de « porte à porte », vrai atout du train dans les centres urbains, par exemple en facilitant l’accès des gares et des trains aux vélos ;
  • Agir sur le pouvoir d’achat des usagers du train : abaissement de la TVA (de 10 % à 5,5 %), baisse du prix des redevances ferroviaires, etc.

Si le rapport plaide pour une « stratégie ferroviaire nationale » articulant aménagement du territoire, transition écologique et investissement accru, tout résidera désormais dans la capacité à exécuter une politique ferroviaire cohérente et constante à la hauteur des ambitions.

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