Un bail commercial a été conclu avec des locataires concernant des locaux à usage de débit de boissons, restaurant et dancing.

En raison d’un défaut structurel de la charpente, et après avis de la commission de sécurité communale, le maire de la commune a ordonné la fermeture au public de l’établissement.

La société locataire a ensuite été placée en liquidation judiciaire. Au vu du désordre précité, le liquidateur a assigné le bailleur en invoquant un manquement à son obligation de délivrance afin d’obtenir la résolution judiciaire du bail commercial et la restitution de l’ensemble des loyers perçus ainsi que l’indemnisation des divers préjudices.

Par arrêt rendu le 23 janvier 2020, la Cour d’appel de ROUEN a débouté le liquidateur de ses demandes après avoir constaté qu’il n’était pas établi que le désordre affectant la charpente existait antérieurement à la conclusion du bail et avoir rappelé que le bailleur, informé de cette situation, avait proposé au preneur de faire procéder à des travaux, proposition à laquelle n’a pas donné suite le locataire.

Un pourvoi a été formé par le liquidateur. Par arrêt en date du 13 octobre 2021, la Cour de cassation rejette le pourvoi et réaffirme clairement que la responsabilité du bailleur ne peut être retenue au titre de son obligation de délivrance que s’il a eu connaissance de désordres antérieurs à la conclusion du bail ou en cours de bail et qu’il s’est abstenu de procéder à leur réparation après en avoir été informé par le locataire.

Cour de cassation, 3ème chambre civile, 13 octobre 2021, pourvoi n°20-19.278, FS-B

La vente et le financement de matériels dans le domaine des énergies renouvelables (“ENR”), notamment de panneaux photovoltaïques, est la source d’un contentieux important, essentiellement devant les juridictions civiles. Mais ce contentieux se développe également de plus en plus devant les juridictions pénales et l’arrêt rendu le 5 mai 2021 en donne une illustration.

Dans cette affaire, un établissement de crédit avait déposé plainte et s’était constitué partie civile du chef d’escroquerie en faisant valoir qu’il avait financé l’acquisition de panneaux solaires par des clients d’une société installatrice qui lui avaient ensuite adressé des réclamations en indiquant que le matériel acheté n’avait en réalité pas été livré, bien que la société lui eût transmis des attestations de livraison. A l’issue de l’information judiciaire, le Directeur commercial de la Société venderesse a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef d’escroquerie pour avoir, par des manœuvres frauduleuses, en présentant à l’établissement de crédit des demandes de déblocage de fonds comportant notamment des faux bons de livraison d’installation et des fausses factures, trompé celui-ci afin de le déterminer à lui verser les financements correspondants aux installations promises à ses clients. Les juges du fond sont entrés en voie de condamnation et l’ont condamné à indemniser certaines parties civiles.

L’arrêt rendu par la Chambre criminelle se distingue surtout par l’éclairage qu’il apporte concernant l’exercice de l’action civile.

En effet, le prévenu faisait grief au Juge du fond d’avoir déclaré recevables et bien fondées les constitutions de partie civile de différents clients emprunteurs, qui s’étaient ainsi vu octroyer des dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices matériel et moral.

La Haute juridiction a cassé la décision rendue par la Cour d’appel sur ce point. Pour ce faire, elle rappelle que selon les articles 2 et 3 du Code de procédure pénale, seul le préjudice découlant directement des faits objets de la poursuite peut donner lieu à indemnisation. Or, selon la Chambre criminelle, en octroyant des dommages et intérêts aux parties civiles visées “alors que l’escroquerie consistant à se faire remettre par l’établissement de crédit, au moyen de manœuvres frauduleuses, le montant des crédits à la consommation accordés aux clients de la société installatrice, bien que le matériel commandé par ceux-ci n’ait pas été installé ou même livré, n’a causé un préjudice direct qu’à la société ayant versé les fonds, et que les préjudices invoqués par les parties civiles ne prennent pas leur source dans ce versement, mais dans l’inexécution par la société de ses obligations contractuelles à leur égard, la Cour d’appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus rappelé.

Ce faisant, la Chambre criminelle fait droit au moyen de cassation qui soulignait qu’il résultait de la prévention que les faits d’escroquerie ont été commis au préjudice du seul établissement de crédit, à qui le prévenu présentait des faux bons de livraison et fausses factures afin de le déterminer à verser des financements correspondants aux installations promises à ses clients et qu’ainsi, le préjudice de ceux-ci résultant de l’absence d’installation des panneaux photovoltaïques et de l’absence de versement de la subvention « énergie renouvelable », était indirect au sens de l’article 2 du Code de procédure pénale.

Cour de cassation, chambre criminelle, 5 mai 2021, pourvoi n° 20-82.447

La situation traitée ici par la Cour d’appel de Paris est celle dans laquelle le bien exproprié est occupé par une société dirigée par le propriétaire lui-même.

Dans ce cas, la Cour estime qu’un abattement pour occupation de 20 %, au lieu des 30 à 40 % habituels, doit être appliqué au montant de l’indemnité principale représentative de la valeur vénale, au motif que le déménagement est grandement facilité.

Cela n’empêche pas le propriétaire exproprié de recevoir une indemnité accessoire pour perte de revenus locatifs, équivalente à un an de loyers. Il est intéressant d’observer que cette indemnité est calculée normalement, alors que l’abattement pour occupation, comme cela a été dit précédemment, a été significativement réduit.

Réf. : CA Paris, pôle 4 – ch. 7, 18 nov. 2021, n° 20/15812

Le SMT intervient sur le périmètre des agglomérations de Cap Excellence et de la Riviera du Levant et couvre les besoins en mobilité de près de la moitié de la population. Notre cabinet accompagnera le Syndicat pour des enjeux majeurs de modernisation et d’innovation, qui nécessite à la fois réactivité, disponibilité et créativité et une connaissance approfondie des milieux ultra-marins.

Le Syndicat Mixte des Transports de Guadeloupe renouvelle sa confiance au cabinet Cloix & Mendès-Gil pour l’accompagner dans ses projets de Mobilité.

L’arrêt de la Cour de cassation du 23 juin 2021 permet d’éclaircir une des (multiples) zones d’ombre restantes en matière de clause de non-concurrence applicable à un associé cédant.
En l’espèce, dans le cadre de la cession des parts sociales de la société, (i) le protocole de cession comprenait une clause de non-concurrence à la charge du cédant associé dirigeant (non salarié), et (ii) une promesse d’embauche était annexée audit protocole de cession. Suite à son licenciement, l’associé cédant a assigné la société en nullité de la clause de non-concurrence.

La Cour de cassation, après avoir constaté que la clause de non-concurrence était limitée dans le temps, dans l’espace, et proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, relève, qu’à la date de cession, l’associé cédant n’avait pas la qualité de salarié mais bénéficiait uniquement d'une simple promesse d'embauche et de conclure que « c'est à bon droit que la Cour d'appel n'a pas soumis la validité de la clause de non-concurrence litigieuse à la condition qu'elle soit assortie d'une contrepartie financière ».

Ainsi, la Cour de cassation, comme la Cour d’appel, ne fait pas droit aux arguments de l’associé cédant aux termes duquel il estimait que nonobstant la qualification de promesse d’embauche, le contrat de travail avait été formé, « l'emploi proposé et la date d'entrée en fonctions ayant été précisés (au sein de la promesse) ».

Cour de cassation, chambre commerciale, 23 juin 2021, pourvoi n° 19-24.488

La Cour de cassation, dans un arrêt en date du 22 septembre 2021, répond par la négative à cette question.

Dans cette affaire, l’associé gérant d’une SARL a cédé la totalité de ses parts et a octroyé au cessionnaire une garantie d’actif et de passif.

Le cessionnaire a enclenché cette garantie au motif que, postérieurement à la cession, il est apparu des irrégularités dans la gestion de la société commises par le cédant.
La Cour d’appel a fait droit à la demande du cessionnaire et a retenu la responsabilité du cédant sur le fondement de l’article L.223-22 du Code de commerce. Elle énonce que les gérants sont responsables envers la société ou les tiers des fautes commises dans leur gestion et que les faits multiples antérieurs à la cession, relevés par le cessionnaire, sont bien constitutifs de fautes de gestion de la part du cédant.

La Cour de cassation censure cette interprétation. Pour actionner une garantie d’actif et de passif il faut établir l’existence d’une diminution de l’actif ou une augmentation du passif, le seul fait de démontrer l’existence de fautes de gestion antérieurement à la cession ne suffit pas à faire droit à la demande du cessionnaire. Si le cessionnaire avait démontré que les fautes de gestion commises par le cédant avaient fait apparaître une diminution de l’actif ou une augmentation de l’actif, la réponse aurait certainement été différente et le cessionnaire aurait certainement pu faire jouer sa garantie à l’encontre du cédant.

Cour de cassation, chambre commerciale, 22 septembre 2021, pourvoi n° 19-22.938

Une société peut décider d’attribuer gratuitement ses propres actions à ses salariés. Le salarié bénéficiaire ne devient pas immédiatement propriétaire des actions. Il faut obligatoirement qu’un temps s’écoule entre la date d’attribution des actions et la date où le salarié bénéficiaire devient propriétaire. Ce temps est appelé période d’acquisition. La société fixe la durée de la période d’acquisition, mais en respectant la durée légale minimale d’un an (sauf en cas d’invalidité du salarié).

La société peut aussi fixer librement une période de conservation des actions. Le salarié ne peut pas vendre les actions avant la fin de cette période, même s’il est devenu propriétaire suite à la fin de la période d’acquisition.

La mise en paiement des dividendes dont la distribution a été décidée pendant une période de conservation peut-elle être reportée au terme de cette période alors que le Code de commerce impose un paiement dans un délai maximal de neuf mois à compter de la décision de distribution ? Le droit aux dividendes lui-même peut-il être supprimé pendant cette même période ?

L’Association nationale des sociétés par actions (Ansa) estime que rien n’interdit de prévoir le report de la mise en paiement des dividendes au terme de la période de conservation. Ce report doit être décidé par le conseil d’administration ou le directoire à qui il appartient de fixer les conditions et, le cas échéant, les critères d’attribution des actions. Plus généralement, le droit de jouissance portant sur les actions peut être reporté à l’issue de la période de conservation.

Pour l’Ansa, le conseil d’administration ou le directoire peut aussi décider de supprimer, pendant la période de conservation, le droit aux dividendes attaché aux actions attribuées. En effet, la privation du droit aux dividendes ne serait alors être que temporaire et ne contreviendrait donc pas à la prohibition des clauses léonines prévue à l’article 1844-1, al. 2 du Code civil, qui suppose une privation totale du droit aux bénéfices ou une suppression sur une période très longue.

Communication Ansa du 7 juillet 2021, comité juridique n° 21-024

Dans son jugement du 1er juillet 2021, le Tribunal judiciaire précise le régime applicable au format d’émissions.

Dans cette affaire, la société Konbini estimait que le Maire d’une ville avait mis en ligne, en violation de ses droits, sur la page Facebook officielle de sa campagne électorale un clip intitulé « Fast & Cabourg » reprenant le concept, le format, la présentation visuelle et sonore de son émission « Fast & Curious ».

Le Tribunal, après avoir défini le format d’émission comme « le document qui définit précisément et de façon complète, en principe sous une forme écrite, le contenu d’un programme audiovisuel », précise les différents régimes de protection applicables en la matière :

  • le droit d’auteur, en ce que « qu’il confère une forme aux idées, le format est susceptible d’appropriation et de protection par le droit d’auteur, au même titre que les émissions réalisées, dès lors qu’il est original, c’est à dire qu’il porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et ne constitue pas la banale reprise du fonds commun des programmes audiovisuels » ;
  • la concurrence déloyale, et plus particulièrement le parasitisme, à savoir « le fait, pour un agent économique, de s’immiscer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire particulier », et ce même sans situation de concurrence.

En l’espèce, si le Tribunal judiciaire n’a pas retenu la protection du droit d’auteur en raison de l’absence d’éléments caractérisant « l’empreinte de la personnalité de l’auteur des formats en litige », il constate, toutefois, l’existence d’un acte de parasitisme sur le fondement de l’article 1240 du Code civil en relevant « que le Maire s’est approprié le travail créatif et promotionnel de la société KONBINI, tout en s’épargnant le coût et les efforts d’une création personnelle, aux fins de promotion de sa candidature aux élections municipales, ce qui caractérise le parasitisme ».

Tribunal judiciaire de Paris, 1er juillet 2021, affaire n° 20/03225

Dans cette affaire, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait à traiter des questions suivantes :

  • « L’article 5, paragraphe 1, de la [directive 91/250] doit-il être interprété comme permettant à l’acquéreur légitime d’un programme d’ordinateur de décompiler tout ou partie de celui-ci lorsque cette décompilation est nécessaire pour lui permettre de corriger des erreurs affectant le fonctionnement dudit programme, y compris quand la correction consiste à désactiver une fonction qui affecte le bon fonctionnement de l’application dont fait partie ce programme ? » ;
  • « Dans l’affirmative, doit-il en outre être satisfait aux conditions de l’article 6 de la directive ou à d’autres conditions ? »

A titre liminaire, il est rappelé que (i) l’article 5 de la directive 91/250 (la « Directive ») prévoit les exceptions aux droits exclusifs de l’auteur de logiciel visés à l’article 4 de la Directive, (ii) l’article 6 de la Directive encadre le droit à la décompilation du logiciel par le licencié.

A la première question, la CJUE répond par l’affirmative en rappelant qu’un acte de décompilation se compose d’un acte de (i) traduction, et (ii) de reproduction du code source. Partant de là, la CJUE relève que :

  • Si l’article 5 de la Directive ne vise pas explicitement l’acte de compilation, cet article comprend bien les actes de traduction et de reproduction d’un logiciel ;
  • La correction d’erreurs affectant le fonctionnement dudit programme participe bien au fait de permettre au licencié d’utiliser un logiciel conformément à sa destination, y compris par correction d’erreurs, objectif visé à l’article 5 de la Directive.

A la deuxième question, la CJUE répond par la négative en estimant que les dispositions de l’article 5 de la Directive prévoient des limites au droit de décompilation, à savoir que (i) le défaut informatique doit affecter la possibilité d’utiliser le programme concerné « d’une manière conforme à sa destination », et (ii) l’acte de décompilation doit être « nécessaire ».

Cependant, la CJUE conclut en précisant que le licencié « n’est en droit de procéder à une telle décompilation que dans la mesure nécessaire à cette correction et dans le respect, le cas échéant, des conditions prévues contractuellement avec le titulaire du droit d’auteur sur ledit programme ».

Cour de justice de l’Union européenne, 6 octobre 2021, affaire n° C13/20