Dans un précédent billet publié le 28 octobre dernier, une synthèse de l’analyse de l’ART sur le projet de décret relatif aux lignes de desserte fine du territoire a été présentée. La présente publication concerne cette fois l’avis de l’ART susvisé s’agissant du régime juridique de ce transfert de gestion (ou de missions).

Sur la répartition des responsabilités et les obligations du bénéficiaire du transfert

Ce projet de décret prévoit clairement que :

  • L’AOT bénéficiaire du transfert (ou le tiers à qui serait confiée la responsabilité de ce transfert : Tiers délégataire) assume la pleine responsabilité des missions de gestion de l’infrastructure (et des installations de service éventuellement transférées)
  • L’AOT ou le Tiers délégataire doit élaborer un document de référence du réseau qui sera intégré au Document de référence du réseau ferré national

L’ART constate sur ces sujets que certaines précisions font défaut :

  • Imposer à l’AOT ou au Tiers délégataire la garantie d’un accès équitable et non discriminatoire au réseau
  • Préciser les obligations s’imposant à ce nouveau gestionnaire d’infrastructure au regard des différents régimes de gestion d’infrastructure prévus actuellement par le code des transports (notamment l’article L.21222 du Code des transports)
  • Déterminer si les spécifications techniques d’interopérabilité s’imposent ou non sur le réseau transféré
  • S’agissant des gares, le nouveau gestionnaire présenterait également cette qualité pour les gares transférées, en substitution de SNCF Gares & Connexions, il est donc nécessaire de lui transposer les obligations garantissant également un accès équitable, non discriminatoire et transparent aux gares
  • Un renvoi aux exigences pesant sur le gestionnaire unifié des gares actuel (c’està-dire SNCF Gares & Connexions) est nécessaire notamment sur la tarification, la publication de l’offre de référence

Concernant la compensation financière du transfert de gestion ou de certaines missions

Sans entrer dans les détails, le projet de décret prévoit que l’impact économique pour SNCF Réseau est évalué sur la différence entre d’une part les recettes et coûts résultant de la trajectoire de référence (sans transfert) et les coûts et recettes résultant de la trajectoire de projet correspondant à la mise en œuvre du transfert.

En cas de transfert de certaines missions incluant l’entretien de la ligne, l’impact est évalué sur la différence entre les coûts prévisionnels d’entretien directs de la ligne suite au transfert et ces mêmes coûts dans la situation de référence.

L’ART constate que la compensation financière ne prend pas en compte la perte d’économie d’échelle ou d’envergure ainsi que la valeur nette comptable de l’actif résultant du transfert. L’ART explique que quand bien même le transfert entraînerait un impact économique positif pour SNCF Réseau, en principe, la régulation tarifaire des redevances d’accès devrait neutraliser cet impact.

Or, cette circonstance ne semble pas prise en compte par le projet de décret.

Ensuite, pour l’ART, le projet de décret soulève des incertitudes sur le contenu tant des recettes prises en compte pour évaluer la compensation financière que des coûts.

S’agissant des recettes, l’annexe du projet de décret précise que les recettes à prendre en compte sont les redevances liées à la circulation des trains. Or, il pourrait aussi bien s’agir des redevances de circulation électrique que celles couvrant l’ensemble des redevances payées pour les services de transport ferroviaire.

En outre, un tel système ne traduirait pas fidèlement la réalité économique du transfert. En effet, l’ART explique que ces redevances sont déterminées au regard du coût marginal moyen de l’ensemble du réseau ferré national. Or, si certaines lignes sont retranchées de ce réseau, le coût marginal moyen est alors susceptible de varier surtout sur les portions de lignes transférées à une autorité organisatrice régionale dès lors que SNCF Réseau ne peut plus bénéficier des effets positifs de la péréquation.

De même, le projet de décret ne précise pas la prise en compte ou non et selon quelles modalités des redevances marché et de la redevance d’accès payé par l’Etat dans le calcul de la compensation financière.

S’agissant des coûts, seules les dépenses directes d’entretien et d’exploitation seraient prises en compte ce qui exclurait les coûts d’amortissement et les éventuels coûts de capital. En outre, l’appréciation du caractère direct des dépenses d’entretien et d’exploitation serait difficile à effectuer.

Il reste à espérer que le projet de décret apportera des réponses et précisions à ces interrogations et que malgré la crise sanitaire, sa publication ne sera pas retardée.

Le projet de décret relatif aux lignes de desserte fine du territoire prévu par le fameux article 172 de la LOM a fait l’objet d’un avis de l’ART.

Ce projet a fait l’objet d’une publication par certains médias.

A travers cet avis, l’ART nous révèle différentes dispositions de ce décret et les observations qu’il soulève.

Rappelons que l’article 172 de la LOM introduit notamment l’article L.2111-1-1 du Code des transports prévoyant la possibilité le transfert de gestion au bénéfice d’une « autorité organisatrice de transport ferroviaire » (et donc a priori pas uniquement les régions) de :

  • lignes d’intérêt local ou
  • de lignes d’intérêt régional à faible trafic

Le projet de décret prévoit que le transfert de gestion peut intégrer des installations de service exclusivement dédiées aux lignes transférées.

Un prochain article portera sur le régime de ce transfert de gestion.

Sur la définition des lignes d’intérêt local

Le projet de décret définit ces lignes par référence :

  • A l’arrêté pris en application du II de l’article L.21222 du Code des transports, or, l’ART confirme que cet arrêté qui a pour objet de fixer la liste des « infrastructures ferroviaires locales » n’est jamais paru
  • Aux lignes mentionnées au IV de l’article L.21222 du Code des transports à savoir les lignes :
    • ne dépassant pas 100 kilomètres
    • qui sont utilisées :
      • pour le trafic de fret entre une ligne principale et des points d’origine et de destination d’acheminement situés sur ces lignes
      • mais qui peuvent également être utilisées dans des conditions définies par décret pour des services de transport de voyageurs à condition :
        • que ces lignes soient gérées par des entités autres que SNCF Réseau
        • qu’elles soient utilisées par une seule entreprise ferroviaire de fret ou que les fonctions essentielles soient exercées par un organisme non contrôlé par une entreprise ferroviaire

Or, pour cette deuxième catégorie de lignes, les conditions sont tellement restrictives, qu’en pratique, aucune ligne ne répond à ces conditions.

Par conséquent, il faut en déduire qu’à ce jour, il n’existe aucune ligne d’intérêt local.

Sur la définition des lignes d’intérêt régional à faible trafic

Les lignes d’intérêt régional

Il s’agit des lignes sur lesquelles ; sur les trois derniers horaires de service :

  • le trafic de l’autorité organisatrice concernée atteint 90 % du trafic
  • il n’y a eu aucun trafic

L’ART regrette que le seuil ne prenne pas en compte d’une manière ou d’une autre le reste du trafic : national, fret et open access. Ainsi, l’ART indique qu’elle sera vigilante sur ce point dans l’avis qu’elle sera appelée à donner sur chaque transfert de gestion, l’autorité bénéficiaire du transfert devra garantir un accès équitable et non discriminatoire au réseau.

Les lignes à faible trafic

L’ART constate que le projet de décret définit les lignes à « faible trafic » comme celles ne faisant pas partie du « réseau structurant » tel que défini par le contrat de performance signé entre l’Etat et SNCF Réseau. Or, ce contrat est limité dans la durée (2017-2026) ce qui ne garantit pas une mise en œuvre uniforme sur la durée.

Ce contrat de performance prévoit que le réseau structurant comprend la LGV, le réseau ferré d’Ile-de-France et les lignes classées dans les catégories UIC 7 à 9.

Cette dernière classification est établie par SNCF Réseau en partie sur la base de celle de l’Union internationale des chemins de fer. Cette classification est destinée à classifier la maintenance selon des catégories de lignes déterminées en fonction du tonnage supporté par la voie. Or, l’ART explique que la classification ainsi opérée ne traduit pas forcément le trafic réel.

Un transfert de gestion pouvant intégrer des installations de service « exclusivement dédiées » aux lignes concernées par le transfert

Le projet de décret prévoit la possibilité que le transfert de gestion intègre également les « installations de service exclusivement dédiées » aux lignes concernées par le transfert. Lorsque les installations de service sont des gares, il faut en outre que le transfert porte sur « un ensemble cohérent de gares exclusivement dédiées à la ligne ».

A titre liminaire, il convient de distinguer le mécanisme mis en place par ce projet de décret et celui prévu par l’article L.2121-17-4 du Code des transports.

Le mécanisme prévu par le projet de décret sur les lignes de desserte fine du territoire concerne un transfert de gestion alors que le mécanisme prévu par l’article L.2121-17-4 du Code des transports s’apparente plus à un mandat à une autorité organisatrice qui fournit pour le compte de SNCF Gares & Connexions des prestations de gestion et d’exploitation des gares. L’ART a également rendu un avis sur le projet de décret pris en application de l’article L.2121-17-4 du Code des transports (avis n°2020-064 du 8 octobre 2020).

Pour en revenir sur le projet de décret relatif aux lignes de desserte fine du territoire, l’ART considère que les termes utilisés « ensemble cohérent » ne permettent pas de caractériser le champ d’application matériel.

Elle recommande par ailleurs que ce transfert ne porte que sur les gares durablement « mono-transporteurs » dans l’hypothèse où elles seraient gérées par une entreprise conventionnée.

En effet, dans l’avis n°2020-064 du 8 octobre 2020 susvisé, l’ART explique que la possibilité, prévue par l’article L.2121-17-4 du Code des transports, pour SNCF Réseau de confier la gestion et d’exploitation d’une gare à une autorité organisatrice (qui les confierait au titulaire d’un contrat de service public) est de permettre une mutualisation des coûts. D’un autre côté, s’agissant d’une « installation essentielle » (point 10 de l’avis), il faut garantir l’accès de tous les transporteurs à la gare.

Aussi, le transfert de gestion (ou la délégation de gestion pour le compte de SNCF Réseau en application de l’article L.221-17-4 du Code des transports) d’une gare devrait être limité à celle qui est mono-transporteur pour éviter notamment des discriminations dans l’accès à cette gare.

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