Bien que la décision de préemption doive indiquer le projet en vue duquel cette prérogative est exercée, l’article L. 213-11 du Code de l’urbanisme autorise l’autorité administrative à utiliser les biens préemptés pour mettre en œuvre une action ou opération d’aménagement qui peut être différente.

Faisant application de cette disposition, la Cour administrative d’appel de Nantes a jugé, par un arrêt du 2 juillet 2021 (req. n° 20NT02159), que l’autorité administrative qui avait préempté un bien afin d’y réaliser des logements collectifs, avait pu légalement décider de mettre le bien à disposition d’un entreprise. Cet arrêt montre que pour l’application de l’article L. 213-11 précité, le juge administratif fait preuve d’une souplesse notable quant à l’appréciation de la notion d’action ou d’opération d’aménagement.

Cour administrative d’appel, Nantes, 2 juillet 2021, requête n° 20NT02159

Un permis de construire délivré par le maire de Montpellier était assorti d’une réserve technique relative à la rétrocession à la métropole de Montpellier d’une partie du terrain d’assiette, d’une superficie de 164 m², aux fins de la création d’un cheminement piétonnier ouvert à la circulation du public.

La question se posait de savoir dans quelle mesure il devait être tenu compte de cette prescription pour apprécier la conformité du projet aux règles d’implantation du règlement du plan local d’urbanisme.

Selon le Conseil d’État, la conformité de l’autorisation de construire aux règles du plan local d’urbanisme relatives à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives doit être appréciée en prenant en considération cette prescription, ainsi que la division foncière en résultant nécessairement.

En conséquence, c’est sans erreur de droit que, tenant compte des effets obligatoires attachés aux prescriptions assortissant une autorisation de construire, le tribunal administratif avait jugé que les règles d’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ne trouvaient pas à s’appliquer.

Cependant, pour un autre motif, le jugement attaqué est annulé. En effet, le tribunal avait omis de répondre au moyen tiré de l’illégalité de cette prescription. Le jugement est donc insuffisamment motivé, la légalité de la prescription devant ici être prise en compte pour apprécier la légalité du permis de construire.

Conseil d’État, 5 juillet 2021, n° 437849, Tables Lebon

Dans une décision du 28 juin 021 (n°2021-158), la Défenseure des droits se prononce sur les réclamations de plusieurs usagers confrontés à des difficultés pour acheter des billets en gare ou dans le train avec pour conséquence des majorations tarifaires.

Le contexte : des difficultés d’acquisition de titres de transport dans certaines gares ou trains avec pour conséquence des majorations tarifaires

La Défenseure des droits a été saisie par des usagers ayant été victimes d’une impossibilité d’acheter des titres de transports soit en gare, soit à bord d’un TER. Cette difficulté d’accès aux titres de transport concerne plusieurs départements : la Haute-Vienne, l’Allier, le Jura.

En effet, ces usagers empruntant le TER dans une gare dite « point d’arrêt non géré » (PANG) ne pouvaient acheter leur billet ni en gare ni dans le train à compter d’une certaine date (courant de l’année 2019). Ils devaient procéder à cette acquisition par voie dématérialisée alors même que certains territoires ne sont pas ou mal couverts par le réseau internet.

La conséquence pour ces usagers est soit la verbalisation soit la majoration du titre de transport. Ainsi, par exemple, parmi ces usagers, un malvoyant a fait l’objet d’une amende de 100 € pour défaut de titre de transport d’un trajet de 18 km d’un montant de 3,5 € alors même qu’il s’était rendu spontanément auprès du contrôleur du train.

Des explications ont été demandées auprès de SNCF qui a expliqué que la délivrance des billets par un agent de commercialisation, lors de la montée à bord dans un PANG, n’avait pas le caractère d’une verbalisation. Il a été par ailleurs confirmé que la délivrance de ces billets se faisait désormais « à un tarif commercial ».

Ces nouvelles dispositions auraient ainsi pour objectif de renforcer la lutte contre la fraude, génératrice de pertes financières pour la SNCF et d’incivilités fréquentes envers les agents et les autres voyageurs.

La réglementation applicable

La Défenseure des droits explique qu’il ressort de la réglementation (le code des transports et le règlement européen n°1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires) que « les usagers du transport ferroviaire, bénéficient à la fois d’un droit à la mobilité, d’un droit à l’information et de la garantie d’une exploitation « transparente et non discriminatoire » des installations de service mise à la charge de Gares et Connexions, filiale de la SNCF » (§ 20).

Au regard de ces principes, la Défenseure des droits examine les modalités concrètes d’accès aux titres de transport et les barèmes applicables.

L’analyse des moyens d’accès aux titres de transport dans les PANG et les barèmes applicables

Au regard des principes susvisés, l’acquisition par voie dématérialisée des titres de transport ne doit pas constituer le seul moyen de distribution pour les raisons suivantes :

  • Certains usagers habitent dans des zones blanches ou grises
  • Certains usagers ne disposent pas de moyens numériques ou éprouvent des difficultés pour les utiliser
  • L’absence d’alternative à l’achat de billets dématérialisés peut constituer une discrimination pour les usagers en situation de handicap

S’agissant des barèmes applicables en cas d’achat de titres papier dans les trains (à défaut de guichet automatique dans les PANG), la Défenseure des droits constate une multiplicité de barèmes mal connus des usagers et qui ne sont pas toujours justifiés.

Ainsi, il ressort de ces barèmes que :

  • Une majoration est appliquée alors même que l’usager n’a pas eu la possibilité d’acheter un titre papier
  • Cette majoration peut être plus importante alors même qu’il n’y a pas d’agent commercialisant les titres de transport dans le train
  • les contrôleurs verbalisent parfois des usagers alors même qu’ils n’avaient pas la possibilité d’acheter un titre de transport

L’objectif de lutte contre la fraude ne constitue pas un motif suffisant dès lors qu’il aboutit à des ruptures d’égalité.

Les recommandations de la Défenseure des droits

Au regard de cette situation et de la réglementation, la Défenseure des droits recommande :

  • de limiter la suppression des guichets dans les gares et la transformation des gares en PANG, en particulier sur le réseau TER ;
  • le cas échéant, de mettre en place dans les PANG des distributeurs automatiques de titres de transport et de veiller à en assurer une maintenance permanente ;
  • de porter clairement à la connaissance des voyageurs les barèmes de régularisation lors de la montée dans un train au départ d’un PANG, par tout moyen utile, y compris par un affichage sur les quais en caractères suffisamment lisibles et accessibles aux voyageurs en situation de handicap ;
  • de modifier les modalités de régularisation des voyageurs empruntant des trains au départ d’un PANG, les modalités actuelles apparaissant constitutives d’une inégalité de traitement des usagers ;
  • d’appliquer les barèmes « exceptionnel » et « de bord » dans les trains sans accompagnement commercial systématique ;
  • de rappeler à l’ensemble des agents de contrôle que les voyageurs montés à bord d’un train à partir d’un PANG doivent pouvoir bénéficier d’un tarif de régularisation et que la verbalisation ne doit intervenir qu’à raison d’un défaut de présentation spontanée du voyageur, ou en cas de fraude avérée.

La Défenseure des droits demande à la SNCF de rendre compte des suites données aux recommandations ci-dessus dans un délai de trois mois à compter de la date de notification de la présente décision, qui est également adressée pour information à l’Assemblée des Régions de France.

Le Cabinet Cloix & Mendès-Gil est heureux d’annoncer la promotion de Maître Charlotte DUMONT au rang de Counsel.

Charlotte Dumont a rejoint le Cabinet en 2014. Rattachée au pôle Droit social dirigé par Maître Léa DUHAMEL, elle intervient dans les dossiers sensibles en contentieux comme en conseil.

Créé en 2001, le Cabinet Cloix et Mendès-Gil accompagne une clientèle de personnes morales privées et publiques. L’équipe fait de la curiosité et de l’engagement ses valeurs phares. Sa définition du métier : comprendre les fonctionnements des entreprises clientes, être à leur écoute et s’impliquer à leurs côtés pour les aider à prendre des décisions.

 

Pour renforcer son équipe, le département Droit social recherche un(e) stagiaire à compter janvier 2022 – ou avant -.

La clientèle du département est essentiellement constituée de sociétés ; l’activité également répartie entre le conseil et le contentieux.

Afin de parfaire sa formation, le(la) stagiaire sera intégré(e) aux activités de l’équipe et participera, sous la supervision des avocats, à la gestion de l’intégralité des dossiers. Ses principales missions seront les recherches juridiques, la rédaction de conclusions, de consultations et de notes, la veille juridique et la mise à jour de l’actualité sociale du Cabinet, ainsi que la constitution des dossiers de plaidoirie. Il accompagnera les avocats aux audiences.

Un Master II Droit du travail – Droit social est demandé (les autres candidatures ne seront pas examinées).

Merci d’adresser votre candidature à l’adresse suivante : cabinet@cloix-mendesgil.com

Le 14 juin 2021, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) réunie en sa formation restreinte a prononcé à l’encontre de la société BRICO PRIVE une sanction de 500 000 € pour divers manquements relatifs à la protection des données personnelles (la CNIL a décomposé l’amande administrative en deux : 300 000 € pour les divers manquements au RGPD – manquements relevés dans le cadre de la coopération entre les autorités de contrôle européennes -, et 200 000€ pour les manquements relevant du droit français et donc de la compétence exclusive de la CNIL), ainsi qu’une injonction de mettre en conformité le traitement des données à caractère personnel dans les trois mois à venir.

Il est à noter que cette sanction a donné lieu à la mise en œuvre d’une procédure de coopération entre les autorités européennes de contrôle (ici l’Italie, l’Espagne et le Portugal en plus de la France), comme prévu aux articles 56 et 60 du règlement RGPD en ce qui concerne les manquements au dit-règlement (la Cnil indique : « les investigations ayant permis d’établir le caractère transfrontalier du traitement concerné, la CNIL a informé le 27 août 2019, conformément à l’article 56 du RGPD, l’ensemble des autorités de contrôle européennes de sa compétence pour agir en tant qu’autorité de contrôle chef de file et a ainsi ouvert la procédure pour la déclaration des autorités concernées sur ce cas »).

La CNIL a retenu contre BRICO PRIVE 6 six manquements :

  • Manquement à l’obligation de limiter la durée de conservation des données : BRICO PRIVE avait bien transmis à la CNIL sa politique en matière de conservation de données, mais elle ne s’y est pas tenue. De plus, BRICO PRIVE conservait des données de clients n’ayant pas passé commande, ou ne s’étant pas connectés sur le site depuis plus de 5 ans.
  • Manquement relatif à l’obligation d’informer les personnes concernées. Certaines informations que BRICO PRIVE se devait de mentionner aux personnes concernées étaient absentes ou partiellement absentes de son site internet, à savoir :
  • les coordonnées du délégué à la protection des données ;
  • les durées de conservation des données ;
  • les bases juridiques des traitements ;
  • ainsi que certains droits dont les personnes bénéficient au titre du RGPD : A savoir, droit à la limitation du traitement, droit à la portabilité des données et droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.
  • Manquement relatif à l’obligation de respecter les demandes d’effacement de données à caractère personnel. En effet, il est apparu que BRICO PRIVE ne respectait pas les demandes d’effacement de données des clients, celle-ci se contentant seulement de désactiver son compte, conservant donc les données.
  • Manquement relatif à l’obligation d’assurer la sécurité des données à caractère personnel. La société n’imposait pas l’utilisation d’un mot de passe robuste lors de la création d’un compte sur son site web ou lors de l’accès des salariés au logiciel de gestion de la relation client. De plus, l’authentification des salariés pour accéder aux bases de données de la société était insuffisamment sécurisée en raison de la conservation des mots de passe permettant d’y accéder, en clair, dans un fichier texte contenu dans un ordinateur de la société. Enfin, les salariés de la société accédaient à une copie de la base de production de la société BRICO PRIVÉ par un compte commun à quatre salariés.
  • Manquement aux obligations relatives à l’utilisation des cookies. Plusieurs cookies étant déposés directement à l’arrivée de l’internaute sur le site, sans que les personnes concernées puissent accorder leur consentement.
  • Manquement relatif à l’obligation de recueillir le consentement de la personne concernée pour la réalisation d’opérations de prospection directe au moyen de courriers électroniques. Sur le fondement de l’article L. 34-5 du Code des postes et des communications électroniques (CPCE). Il a en effet été révélé que lors de la création d’un compte, sans acte d’achat sur le site, aucun procédé visant à recueillir le consentement à la collecte et au traitement des données à caractère personnel à des fins de prospection commerciale par courrier électronique n’était mis en œuvre.

Cette sanction n’est pas négligeable, surtout si l’on considère les nombreuses actions correctrices mises en œuvre par BRICO PRIVE durant la procédure, afin de corriger les divers manquements relevés par la CNIL.

Ainsi, cette décision rappelle :

  • qu’il convient de porter une attention toute particulière au respect des procédures prévues ; il ne suffit pas de formaliser une procédure, encore faut-il s’y tenir ;
  • que toutes les informations prévues à l’article 13 du RGPD doivent être mentionnées à la personne concernée, même si ces informations sont complexes à obtenir et déterminer ;
  • qu’il convient de mettre effectivement en place le droit des personnes concernées ;
  • que lorsque le consentement est exigé par les textes (cookies ou prospection notamment), il convient de l’obtenir ;
  • que la Cnil peut souhaiter vérifier la conformité au RGPD dans toutes les sociétés du groupe, et non seulement dans celles situées en France ; toutes les sociétés du groupe doivent donc être mises en conformité, la Cnil pourra sanctionner la société française après avoir examiné le respect des exigences du RGPD dans d’autres sociétés du groupe.

Cnil, Délibération SAN-2021-008, 14 06 2021

 

Le 23 avril 2021, une société d’hébergement numérique et son dirigeant ont été condamnés à 100 000 € d’amende pour la société, 20 000 € et six mois de prison avec sursis pour son dirigeant pour contrefaçon.

La société DStorage, hébergeur, a été condamnée par le tribunal correctionnel de Nancy pour ne pas avoir empêché l’accès à des fichiers situés sur ses serveurs constituant des actes de contrefaçon d’œuvres de l’esprit et de vidéogrammes.

Or, la société DStorage avait été notifiée de ce contenu manifestement illicite au sens de l’article 6 de la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN).

Ainsi, aux termes de cet article, les hébergeurs peuvent voir leur responsabilité pénale engagée à raison des informations stockées si, dès le moment où elles en ont eu connaissance, elles n’ont pas agi promptement pour retirer ces informations ou en rendre l’accès impossible.

En l’espèce, l’hébergeur avait été notifié par diverses sociétés de gestion de droits d’auteur concernées par le contenu litigieux (SACEM, SCPP…). Ces dernières lui ont demandé de retirer le contenu litigieux sur le fondement de la LCEN, ce qu’il a refusé, estimant que la procédure de notification de la LCEN s’appliquait seulement aux contenus manifestement illicites « à savoir les contenus relatifs à la pornographie enfantine, à l’apologie des crimes contre l’humanité, à l’incitation à la haine raciale » et, partant, ne s’appliquait pas aux atteintes à des droits de propriété intellectuelle.

Les ayants droit ont alors porté plainte contre la société DStorage aux motifs de l’inaction de l’hébergeur et de la contrefaçon par reproduction et représentation des œuvres hébergées.

L’un des intérêts de la décision porte sur l’interprétation de l’article 6 de la LCEN, dont le Tribunal judiciaire de Nancy apprécie l’application in concreto.

  • Ainsi, le Tribunal rappelle que le terme « manifestement » renvoie à la notion de flagrance dans l’illicéité. En l’espèce, le contenu litigieux correspondait à des œuvres cinématographiques et musicales dont le Tribunal relève qu’elles « ne sont pas connues pour en permettre la libre et gratuite reproduction ou représentation. »

A cet égard, le titre des fichiers eux-mêmes correspondait à des titres d’œuvres cinématographiques et musicales.

  • Par ailleurs, les liens pointant vers les fichiers litigieux étaient des sites notoirement connus pour être des « fermes de liens » vers des contenus contrefaisants.

Dès lors, le caractère manifestement illicite des contenus est établi, le Tribunal judiciaire ne faisant aucune distinction sur le fondement du droit de la propriété intellectuelle, comme tentait de le prétendre l’hébergeur.

Le Tribunal condamne donc l’hébergeur pour les faits de contrefaçon par reproduction, représentation et diffusion non autorisée d’œuvres. De plus, pour ne pas avoir promptement retiré le contenu notifié et donc présumé connu de ses services, la société est considérée comme complice de contrefaçon par fourniture des moyens techniques la permettant.

Si cette évolution plus sévère de la jurisprudence se maintient, elle viendra confirmer un mouvement de responsabilisation des hébergeurs, ce qui incite à une plus grande prudence et une plus grande vigilance de leur part.

Tribunal judiciaire de Nancy 23 avril 2021

« On apprend à notre mère à jouer à Fortnite » : 1,3 millions de vues ; « Cache-cache Géant dans un Parc de Jeux Gonflables Géants ! » : 5 millions de vues. Depuis plus de 5 ans, Néo et Swan, 16 et 8 ans, sont la coqueluche du YouTube Français, sur leur chaîne YouTube qui aujourd’hui totalise plus de 5 millions d’abonnés.

Depuis quelques années, les « enfants youtubeurs » et autres « YouTube family » présents sur les chaines de contenu multimédia, font fureur et inquiètent.

C’est pourquoi, la récente loi n°2020-1266 du 19 octobre 2020, dite « Studer », visant à encadrer l’exploitation commerciale d’images d’enfants de moins de 16 ans diffusées sur des plateformes de partage de vidéo vient encadrer l’activité des « les chaînes familiales », a été promulguée.

Cette loi porte notamment sur les conditions de sécurisation de la « rémunération » dont peuvent bénéficier les enfants qui aident les annonceurs à promouvoir leurs produits.

L’article L. 7124-1 du Code du travail qui oblige, notamment les employeurs dont l’activité consiste à réaliser des enregistrements audiovisuels dont le sujet principal est un enfant de moins de seize ans en vue d’une diffusion à titre lucratif sur un service de plateforme de partage de vidéos, à obtenir une autorisation individuelle préalable, accordée par l’autorité administrative, ne permet pas de faire l’amalgame entre employeur et parent.

Les parents de ces « enfants-influenceurs » filmés ne sont donc pas concernés par cet article, puisqu’il s’agit d’un cadre dit « semi-professionnel ».

En conséquence, sur cette question la nouvelle loi Studer prévoit que la diffusion de contenu audiovisuel dans un cadre semi-professionnel ne nécessite pas une autorisation administrative préalable. Mais elle oblige néanmoins les parents à verser une partie des revenus sur un compte séquestré à la Caisse des dépôts et consignations.

De plus, il est fréquent que les vidéos de ces enfants, permettent aux annonceurs d’effectuer du placement de produits.

Les annonceurs eux aussi sont tenus d’une obligation propre au cadre semi-professionnel. Ces derniers sont tenus de vérifier auprès de la personne responsable de la diffusion, les parents en général, si les revenus directs (issus de placements de produit) tirés de la diffusion dépassent le seuil fixé par décret en Conseil d’État à venir.

C’est à l’annonceur, au cas où ces seuils de revenus et/ou de durée excéderaient le seuil fixé par le Conseil d’État, de verser à la Caisse des dépôts et consignations la somme due en rémunération de l’opération de placement de produit, diminuée de la part des revenus laissée à disposition des représentants légaux.

Le non-respect de cette obligation expose l’annonceur à une amende de 3 750 €.

Les annonceurs dans leur relation contractuelle avec les parents devraient donc veiller à mettre à jour leur contrat pour se conformer à cette nouvelle obligation.

Il s’agira notamment d’ajouter une clause informative et d’expliquer leurs obligations en la matière.

Il s’agira également de se dégager de toute responsabilité dans le cas où les parents ne transmettraient pas les bonnes informations, après demande de vérification.

Le principe a été maintes fois réitéré par la Cour de cassation : une société ne peut contracter tant qu’elle n’est pas immatriculée.

En l’espèce, une société contracte avec une EURL présentée comme en formation et représentée par son gérant. Un mois plus tard, l’EURL est immatriculée au RCS. Moins d’un an après cela, elle se retrouve en liquidation judiciaire. La première société, co-contractante de l’EURL liquidée, assigne le dirigeant de cette dernière en paiement de diverses sommes, considérant qu’il était solidaire des engagements pris avant l’immatriculation de l’EURL et rappelant que « les personnes qui ont agi au nom d’une société en formation avant la formation de celle-ci sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis. »

Cependant, comme le révèle la Cour d’appel, lors du contrat passé avant l’immatriculation de l’EURL, le co-contractant n’était pas le dirigeant de l’EURL mais bien L’EURL elle-même, en cours d’immatriculation, et simplement représentée par son gérant.

Ainsi, ce n’est pas ce dernier qui a « agi pour le compte de la société en sa qualité d’associé ou de gérant » mais « la société elle-même, peu important qu’il ait été indiqué que celle-ci était en cours d’immatriculation, cette précision ne modifiant en rien l’indication de la société elle-même comme parte co-contractante ».

Que faut-il retenir de cette décision ? Le principe posé par la Cour n’est pas nouveau, bien au contraire. Cet arrêt nous révèle une nouvelle situation envisageable qui découle du principe de non-validité des contrats passés par une société non-immatriculée.

Toute personne, physique ou morale doit-elle alors éviter toute relation contractuelle avec une société en formation ? Non. Mais cet arrêt incite à la prudence : Tout d’abord, toujours vérifier si la société avec laquelle on contracte est bien immatriculée, et si ce n’était pas le cas, s’assurer que l’on contracte bien avec son gérant/dirigeant pour le compte de cette dernière, et non avec cette dernière représentée par son gérant/dirigeant.

Cour de cassation, chambre commerciale, 10 février 2021, pourvoi n° 19-10.006

En l’espèce, l’assemblée générale d’une SAS a nommé une présidente pour une durée de 3 ans.

Les statuts de la société prévoyaient que la révocation du président ne pouvait intervenir que pour motifs graves, et que toute révocation faite pour un motif autre qu’un motif grave ouvrait au président un droit à une indemnisation.

A l’issu du terme de son mandat, la présidente s’est maintenue dans ses fonctions, alors qu’aucune décision d’assemblée générale ne s’était prononcée sur le renouvellement de ce mandat. Quelques mois plus tard, une nouvelle assemblée décidait de ne pas la renouveler dans ses fonctions à compter du jour.

L’ex-présidente assignait alors la société en versement de dommages et intérêts et en paiement de l’indemnité statutaire, au motif que sa révocation serait fautive et aurait eu lieu dans des conditions brutales et vexatoires.

Après rejet de sa demande par un arrêt de la cour d’appel, la Cour de cassation confirme cette décision : elle estime que « Lorsque le président d’une société par actions simplifiée a été nommé pour une durée déterminée, la survenance du terme entraîne, à défaut de renouvellement exprès, la cessation de plein droit de ce mandat. Le président qui, malgré l’arrivée du terme, continue de diriger la société ne peut donc pas se prévaloir d’une reconduction tacite de ses fonctions et devient alors un dirigeant de fait qui, à l’égard de la société, ne peut revendiquer les garanties dont bénéficie le seul dirigeant de droit ».

Etendue/portée de la décision : Si l’arrêt vise le dirigeant d’une SAS, il est à n’en pas douter que ce principe posé par la Cour vaut pour tout dirigeant social dont le terme du mandat est déterminé par les statuts ou par la loi.

Rapport avec les tiers : Si dans une situation comme celle décrite dans cet arrêt, le dirigeant passe du statut de dirigeant de droit à dirigeant de fait au jour de la fin de son mandat dans l’ordre interne, il reste dans l’ordre externe président de droit de la société. Ce qui se matérialise notamment par la continuité de son inscription en tant que dirigeant sur l’extrait K-bis de la société. Les tiers pourront alors se prévaloir des actes conclus par l’intéressé au nom de la société en l’absence de publicité les informant de la fin du terme du mandat du président.

Evolution du statut de dirigeant de fait : Par cet arrêt, la Cour se maintient dans une perspective de précarisation du statut de dirigeant de fait : Il ne peut désormais plus revendiquer auprès de la société « les garanties dont bénéficie le seul dirigeant de droit » sans distinction selon l’objet, la source qu’elle soit légale ou statutaire de ces garanties.

Motifs graves et justes motifs : Alors que les statuts disposaient que la révocation du président ne pouvait intervenir que pour motifs graves, on peut affirmer que la solution n’aurait pas été différente si jamais la clause avait exigé un « juste motif de révocation »

Cour de cassation, chambre commerciale, 17 mars 2021, pourvoi n° 19-14.525