Précisions en matière d’ajournement d’une assemblée d’associés
Par un arrêt du 12 septembre 2024 (RG n° 22/02179), la cour d’appel de Paris a précisé le régime applicable en matière d’ajournement d’une assemblée d'associés.
I- Rappel des faits et de la procédure
À la suite d’un conflit l’opposant à l’associé gérant minoritaire d’une SARL, l’associée majoritaire a demandé la convocation d’une assemblée. L’objet de cette assemblée générale était d’étudier la situation actuelle de la société et son administration.
Le gérant a fait droit a cette demande et convoqué une assemblée générale à cette fin le 31 mars 2021.
Par lettre recommandée du 29 mars 2021 adressée à l’associée majoritaire, le gérant a ajourné l'assemblée générale. Cet ajournement était intervenu en raison de la situation sanitaire.
Le 31 mars 2021, l’associée majoritaire a tenu l’assemblée générale de la SARL en l’absence de l’associé minoritaire. A cette occasion, elle a pris des décisions portant sur la révocation de l’associé minoritaire de son mandat de gérant et sa nomination aux fonctions de gérante unique de la société.
Le 31 mai 2021, l’associé minoritaire a saisi le tribunal de commerce de Paris. Après avoir été autorisé à assigner à bref délai, il a sollicité l'annulation de l'assemblée générale du 31 mars 2021 et l'ensemble des résolutions prises lors de ladite assemblée générale. Par jugement du 24 décembre 2021, le tribunal de commerce de Paris l’a débouté de l’ensemble de ses demandes. En substance, celui-ci avait jugé que le gérant avait commis un abus de pouvoir en ajournant l'assemblée, en ce que l'ordonnance du 25 mars 2020 permettait en tout état de cause la tenue d'une assemblée à distance en période de crise sanitaire.
Le 27 janvier 2022, l’associé minoritaire a interjeté appel de ce jugement.
II- La solution de la cour d’appel de Paris
Par sa décision en date du 12 septembre 2024, la cour d’appel de Paris infirme le jugement rendu en première instance.
En premier lieu, la cour d’appel de Paris rappelle la possibilité d’ajourner une assemblée générale.
A cette occasion, elle énumère les conditions de validité à réunir à cette fin :
- La décision d’ajournement doit être portée à la connaissance des associés selon les mêmes formalités que celles auxquelles a donné lieu la convocation, lorsque celle-ci a déjà été effectuée ;
- Le droit d'ajourner une assemblée appartient à celui qui a pris l'initiative de la convoquer ;
- Aucun délai n’est imposé pour exercer valablement ce droit (i.e. faculté d’exercer ce droit entre la date de convocation et la date prévue pour la réunion.).
En second lieu, la cour d’appel de Paris rappelle les effets d’une décision d’ajournement d’une assemblée générale.
L’ajournement a pour effet de renvoyer l'assemblée générale à une autre date et de clôturer la réunion en cours. Les Associés « même représentant une fraction importante du capital social, ne peuvent pas décider de passer outre la décision d'ajournement et de se réunir à la date primitivement fixée. ».
A défaut, la réunion d’une telle assemblée encourt la nullité à moins que tous les associés ne soient présents ou représentés.
Enfin, la cour d’appel de Paris fait application des dispositions de l’article R.223-23 du Code de commerce au cas d’espèce.
Aux termes de ces dispositions, « l'assemblée des associés est présidée par le gérant ou par l'un des gérants. ». « Si aucun des gérants n'est associé ou en cas de décès de l'associé-gérant unique, elle est présidée par l'associé présent et acceptant qui possède ou représente le plus grand nombre de parts sociales. ». « Si deux associés possédant ou représentant le même nombre de parts sont acceptants, la présidence de l'assemblée est assurée par le plus âgé. ».
La cour d’appel de Paris a déduit de ces dispositions que l’associé, même majoritaire, ne pouvait pas présider l’assemblée générale.
Ainsi, cet arrêt permet de rappeler utilement l’ensemble des conditions à réunir afin de s’assurer de l’efficacité d’une décision d’ajournement d’une assemblée générale.