La transformation d’une SARL en SAS est opposable au trésor public dès l’assemblée
La Cour de cassation, dans son arrêt du 18 décembre 2024, fait une mise au point, bienvenue, sur le cadencement de l’opération de cession de titres d’une SAS intervenant à la suite de sa transformation : la transformation est opposable au service de l’enregistrement dès l’assemblée qui la décide.
La SARL TDA International a été transformée en SAS avec effet immédiat à la suite d’une assemblée générale extraordinaire en date du 24 juillet 2012. Le lendemain de cette opération, la société, nouvellement SAS, a cédé ses actions à une autre société.
L’acte de cession a été adressé, le 3 août 2012, au SIE compétent afin de faire enregistrer l’opération. L’acquéreur a réglé des droits d’enregistrement calculés sur la base d’une cession d’actions, c’est-à-dire à hauteur de 0,1% du prix de cession, représentant un montant aux alentours de 40.000 €.
Les formalités de publicité liées à la transformation la société TDA International en SAS ont été effectuées dans un second temps, au cours du mois de septembre 2012.
En décembre 2015, l’administration fiscale a adressé une proposition de rectification contradictoire à l’acquéreur. Elle considérait que la transformation de la société TDA International en SAS lui était inopposable à la date de la cession, et que par conséquent, la cession des titres devait être soumise aux droits d’enregistrement applicables aux cessions de parts-sociales.A l’époque des faits, les droits d’enregistrement d’une cession de parts-sociales se calculaient de la manière suivante : il était appliqué un taux de 3% sur la fraction du prix inférieure à 200.000 €, 0,5% sur la fraction du prix comprise entre 200.000 € et 500.000 € et 0,25% sur la fraction du prix excédant 500.000 €.
(Aujourd’hui les droits d’enregistrement d’une cession de parts-sociales se calculent sur la base d’un taux de 3% appliqué au prix de cession diminué d’un abattement.)
Toujours est-il, qu’en termes de droits d’enregistrement, la cession d’actions est moins onéreuse que la cession de parts-sociales.
Au cas d’espèce, l’administration fiscale demandait à l’acquéreur le paiement de droits supplémentaires à hauteur de 75.000 € (environ) et des intérêts de retard pour un montant d’environ 10.000 €.
Dans cette affaire, la problématique n’était pas de savoir si la transformation d’une SARL en SAS pouvait intervenir antérieurement la cession de titres. Sur ce point la jurisprudence est claire depuis plusieurs années et ces opérations en cascade sont possibles.
La problématique portait plutôt sur le fait de savoir s’il faut attendre de faire les formalités de transformation auprès du greffe pour pouvoir céder les titres de la société sous sa nouvelle forme.
La cour d’appel de Lyon, dans un arrêt du 6 juillet 2023 donnait raison à l’administration fiscale dans une décision qui étonnait et qui invitait les praticiens à la plus grande prudence quant au cadencement des opérations de transformation puis de cession, avec la prise en compte de la réalisation des formalités auprès du greffe et de l’enregistrement de la cession auprès de l’administration fiscale.
En effet, la cour d’appel de Lyon après avoir relevé que la transformation de la société auprès du greffe n’avait pas été publiée avant la cession des titres, a retenu que l’inscription sur le registre de mouvement de titres ne rendait pas la transformation opposable à l’administration fiscale. Selon la cour d’appel, l’administration fiscale n’avait pu avoir connaissance de la transformation qu’après l’enregistrement de la cession des titres puisque les actes de transformation de la société TDA International ne pouvaient lui être opposés que s’ils étaient publiés.
La Cour de cassation dans son arrêt publié au Bulletin, casse l’arrêt de la cour d’appel de Lyon. Elle précise, au visa de l’article 726 I 1° du Code général des impôts (dans sa version applicable au litige), que « les droits d’enregistrement applicables à une cession de droits sociaux sont liquidés selon la nature juridique de ces droits déterminée à la date du fait générateur des droits d’enregistrement, lequel correspond à la date du transfert de propriété, peu important qu’à la date de la soumission de l’acte de cession à la formalité de l’enregistrement, la transformation dont la société a fait l’objet antérieurement n’ait pas été publiée au RCS ».
En conséquence, si une société a été transformée en SAS avant la cession, mais que la formalité auprès du greffe n’a pas encore été publiée, la cession bénéficiera quand même du régime des actions pour le calcul des droits d’enregistrement.
Cette décision de la Cour de cassation est opportune et logique ; elle tient compte à la fois de la volonté des parties, à savoir de procéder à une transformation avant la cession, et de la réalité puisque la transformation a bien eu lieu avant la cession.
Cette décision vient fluidifier le déroulement des transformations suivies d’une cession de titres, les entreprises transformées n’auront plus à craindre un redressement fiscal en raison d’un retard de publication.
Toutefois, il convient de noter que cette décision ne remet pas en cause les formalités de publicité à effectuer lors d’une transformation. Celles-ci devant intervenir dans le délai d’un mois après la décision de l’assemblée générale ayant voté la transformation, conformément à l’article R.123-66 du Code de commerce.